Pierre témoigne : “Il a fallu 10 ans et une poussée sévère pour que je sois diagnostiqué de la SEP...”
Publié le 4 déc. 2025 • Par Candice Salomé
À seulement 17 ans, Pierre a commencé à ressentir les premiers symptômes qui allaient bouleverser sa vie. Picotements, engourdissements, troubles de la vue… son corps lui envoyait des signaux qu’il ne comprenait pas encore. Après une longue errance médicale et dix ans de doutes et de consultations, le diagnostic tombe enfin : sclérose en plaques. Mais loin de se laisser abattre, Pierre transforme cette épreuve en force.
Entre traitements lourds, douleurs chroniques et répercussions sur sa vie personnelle et professionnelle, il trouve des ressources insoupçonnées pour continuer à avancer. Dans son témoignage, il partage son quotidien et ses stratégies pour rester actif et serein.
Bonjour Pierre, vous avez accepté de témoigner pour Carenity et nous vous en remercions.
Pouvez-vous vous présenter ?
Je me présente : Pierre, 44 ans, marié et père de deux enfants, une fille de 16 ans, Adèle, et un fils de 10 ans, Gabin. J’habite aux portes du Mans.
Je suis passionné de skateboard, snowboard et de basket depuis toujours. Cela a forgé toute ma culture, aussi bien graphiquement, physiquement, vestimentairement que musicalement.
Quel est votre parcours professionnel ?
Je travaille dans l’Éducation Nationale, où j’ai exercé différents métiers, de l’enseignement à l’administration. Je suis actuellement adjoint administratif en congé longue durée et en projet de reconversion professionnelle (pour raison de santé).
Pouvez-vous nous raconter comment votre maladie a commencé ?
J’ai grandi en banlieue parisienne, là où j’ai forgé toutes mes expériences de vie. Mais c’est aussi là, à l’âge de 17 ans, que ma vie a commencé à basculer.
Je suis au lycée. Il est un peu plus de 10 h du matin quand je commence à sentir des picotements dans les mains et les pieds. Je ne comprends pas trop ce qui se passe. Je ne me sens pas très bien, je vacille un peu et j’ai besoin de m’asseoir dans le couloir. Cela se transforme en engourdissements ; j’apprendrai plus tard que cela s’appelle des paresthésies.
Je suis immobilisé, mes amis m’envoient chez l’infirmière, et j’ai droit à un sucre avec de la menthe, car je fais sûrement une crise d’hypoglycémie…
Comment s’est déroulé le parcours médical au début ?
Je sens que quelque chose ne va pas, et un rendez-vous avec notre médecin traitant est pris.
Elle nous oriente vers l’hôpital où un scanner m’est prescrit. C’est une période un peu floue : je ne me rappelle pas tout et surtout, je ne comprends pas vraiment ce qui se passe. Je commence à suivre le flot et me laisse porter de rendez-vous en rendez-vous.
Je me souviens, par contre, de ce scanner, mon premier : armada de médecins, premier cathéter qui me fait tourner de l’œil, produit de contraste…
Puis attente, longue attente avec mes parents, puis enfin un résultat : « Votre fils va bien, ce n’est pas la sclérose en plaques ! »
Comment avez-vous vécu la suspicion de maladie psychologique ?
On soupçonne d’abord un syndrome du canal carpien. Je vais voir un spécialiste et évidemment, ce n’est pas ça.
Et là, il n’y a plus qu’une explication possible : c’est dans ma tête, il faut donc que je commence une psychothérapie. Je pense que chaque personne dans ma situation a entendu ça : c’est simplement du stress. Je suis au lycée, ma scolarité était plutôt bonne, mais ces soucis commencent à me peser. Le lien est donc vite établi : la pression scolaire, l’adolescence… tout devrait rentrer dans l’ordre après quelques séances de psy.
Alors je fais ce qu’on me dit, et plus le temps passe, moins ça va. Ma scolarité se dégrade en même temps que mon état.
Comment ont évolué vos symptômes physiques ?
Je commence à consulter différents psychologues, qui ne trouvent pas grand-chose d’anormal dans ma vie. Mais je remarque qu’à chaque effort physique, ma vue se trouble, ça scintille. Personne ne fait de lien, ni avec mes paresthésies, ni avec mon mental. Ça doit donc être une carence en quelque chose.
Les prises de sang sont bonnes. Je vais donc voir un ophtalmologue. Je me revois encore reprendre la voiture seul après mon fond d’œil : j’ai les pupilles dilatées et je ne vois rien. L’examen est à nouveau négatif, mes yeux vont bien.
Quand avez-vous finalement reçu le diagnostic de SEP ?
Le temps file : 5 ans.
Je commence à ressentir de nouvelles choses : les fameuses douleurs neuropathiques. Des décharges électriques aléatoires, des douleurs continues, des coups de couteaux dans le corps.
C’est seulement après 10 ans d’errance médicale, après une poussée sévère avec une névrite optique pendant laquelle j’ai perdu la vue d’un œil pendant 3 semaines, que j’ai eu les bons examens : IRM, ponction lombaire, etc.
J’ai reçu par erreur le compte rendu IRM et ai appelé mon médecin traitant, qui m’a dit de venir le lendemain matin à la première heure. Il n’a pas été capable de vraiment dire les choses, alors c’est moi qui l’ai fait : je me suis annoncé que j’avais la sclérose en plaques. Cela a été plus un soulagement qu’autre chose : j’avais enfin un mot sur mes maux et je n’étais pas fou !
Comment avez-vous géré les traitements et leurs effets secondaires ?
À la suite du diagnostic, mise en place d’un traitement : on me laisse le choix entre deux avec des plaquettes explicatives, et on se revoit bientôt avec mon neurologue pour que je lui fasse part de mon choix.
Avonex, Tysabri, Copaxone, Aubagio, Ocrevus… Chaque changement de traitement se fait avec l’aval de mon neurologue et en prenant en compte le bénéfice/risque/qualité de vie.
Quelles ont été les conséquences de la SEP sur votre vie quotidienne ?
J’ai eu beaucoup de poussées et beaucoup de cures de corticoïdes. À cause de cela, j’ai développé une ostéonécrose bilatérale des têtes fémorales, et en 2021, on a dû me poser deux prothèses totales de hanches.
La fatigue de la maladie et l’impact des traitements m’ont aussi forcé à moins sortir, voir moins de monde et réduire mes activités favorites.
Aujourd’hui, je suis en congé longue durée et m’inscris dans une réorientation totale au niveau professionnel.
Comment vivez-vous la SEP au quotidien, sur le plan personnel et familial ?
La discussion est primordiale et il n’y a pas de tabous à la maison. Cela permet de répondre avec honnêteté à toutes les questions et ainsi pouvoir rassurer.
Je reprends le dessus en faisant beaucoup de sport et en gardant une activité sociale.
Quels conseils donneriez-vous à d’autres personnes vivant avec la SEP ?
La SEP ne nous définit pas mais elle fait partie intégrante de notre vie et de notre quotidien. Soyez fiers de votre différence.
Un dernier mot : Don’t worry, be happy.
Pierre (@Never Sep Down)
Un grand merci à Pierre pour son témoignage !
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