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Spondylarthrite ankylosante : “Je suis restée plus de 10 ans sans diagnostic.”

Publié le 23 févr. 2022 • Par Candice Salomé

Céline, dite Journal d’une Spondy sur les réseaux sociaux, est atteinte de spondylarthrite ankylosante. Ayant connu l’errance médicale pendant plusieurs années, son état de santé s’est rapidement dégradé. Après avoir reçu un second avis, elle a enfin pu mettre un nom sur ses douleurs. 
Depuis, elle a décidé de parler de son quotidien avec la maladie, de l’errance médicale et du manque de sérieux de certains médecins au travers de ses différents réseaux sociaux afin de libérer la parole des autres malades. Elle se livre dans son témoignage pour Carenity. 
 
Découvrez vite son histoire ! 

Spondylarthrite ankylosante : “Je suis restée plus de 10 ans sans diagnostic.”

Bonjour, vous avez accepté de témoigner pour Carenity et nous vous en remercions.

Tout d’abord, pourriez-vous nous en dire plus sur vous ?

Je m’appelle Céline, j’ai 39 ans et je suis maman d’un loulou de 13 ans et nous vivons en Charente-Maritime, plus précisément à La Rochelle. Je suis une ancienne soignante mais, ayant eu un licenciement pour inaptitude professionnelle, je me suis reconvertie en graphiste/illustratrice. 

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En quelle année avez-vous reçu le diagnostic de la spondylarthrite ankylosante ? Qu’est-ce qui vous a poussé à consulter ? Quels étaient vos premiers symptômes ? 

En 2011, ma santé s’est vite dégradée mais les médecins mettaient cela sur une possible surcharge de travail. A l’époque, j’enchainais travail de jour et astreintes de nuits avec des semaines de 60h...  

Puis un jour, impossible de me lever un matin… Il a fallu que l’on attende que je ne puisse plus marcher pour se dire “tiens il y a peut-être quelque chose d’autre”.  

Malheureusement, personne ne m’avait expliqué que j’allais entrer dans un vrai parcours du combattant pour avoir juste un diagnostic

Combien de temps a-t-il fallu pour poser le diagnostic ? Combien de médecins avez-vous rencontré ? Quels examens avez-vous dû passer ?

En fait, j’ai vite appris que l’on aurait pu voir venir la chose car, en réalité, j’ai commencé à avoir des soucis de santé dès mon adolescence. On peut dire que je suis restée plus de 10 ans sans diagnostic mais on mettait toujours tout sur le travail ou le stress. On me faisait comprendre que c’était psychosomatique

Quand, en 2012, je n’arrivais plus à marcher, on m’a prescrit des examens. Je suis allée voir un rhumatologue et, à partir de ce moment-là, j’ai vécu une des plus difficiles périodes de ma vie car je ne savais pas ce qu’était l’errance médicale… Les examens ne montraient qu’un signe inflammatoire mais je n’avais pas le fameux gène HLA B27 (j’ai appris plus tard que ce n’était plus un critère de diagnostic). 

Le rhumatologue m’accueillait avec des paroles telles que : “Tiens, alors qu’est-ce que l’on a aujourd’hui ? Un bobo à la cheville ?” ou bien “Ecoutez, vous êtes jeune vous devriez profiter plutôt que de vous stresser pour rien” et pour finir “Vous êtes trop jeune pour avoir une maladie de vieux !” 

Il était convaincu que tout était psychosomatique (donc dans ma tête) puis il évoqua une potentielle fibromyalgie… Il me laissa pendant 3mois sans aucun traitement contre la douleur. 

Au bout d’à peine 2 mois, mon état se dégradait de plus en plus, je ne pouvais plus marcher, les douleurs commencèrent à gagner ma colonne vertébrale. 

Je pris alors la décision de prendre rendez-vous dans un centre antidouleurs du CHU de Poitiers avec mon dossier médical et là, le médecin regarde avec attention mon lourd dossier, mes examens sanguins, mes différents examens radiologiques et me dit “Ecoutez, je pense que vous êtes atteinte de spondylarthrite ankylosante, je vous envoie voir un Professeur spécialisé sur cette maladie et qui a la particularité d’être atteint lui-même par cette maladie et je pense qu’il connait les difficultés de diagnostic qu’il peut y avoir…” 

C’était la première fois que j’entendais parler de cette maladie… J’ai réussi à avoir un rendez-vous en urgence en 15 jours car, pour elle et pour lui aussi, la maladie avait déjà trop avancée… Quinze jours après, j’obtenais mon diagnostic. 

On m'a immédiatement mise sous traitement lourd car, malheureusement, la maladie avait atteint entre temps ma colonne vertébrale, mes talons, mes poignets… 

Les synovites (inflammations articulaire) ne sont pas apparues immédiatement. J’ai le gène HLAB27 négatif. Bien heureusement, je prenais des photos quand les inflammations arrivaient car c’était tellement impressionnant… Mais à chaque fois que j’allais voir les médecins : zéro inflammation ! Heureusement que j’ai eu cette idée sinon on ne me croyait pas… 

Grâce à ce professeur, j’ai appris beaucoup sur cette maladie, j’ai appris que le gène n’était plus un critère de diagnostic, que parfois rien ne se voit sur les radios au début et que cette maladie pouvait atteindre d’autres articulations ou d’autres organes… 

Qu’avez-vous ressenti à l’annonce de ce diagnostic ? Connaissiez-vous la spondylarthrite ankylosante avant cela ? Avez-vous reçu toutes les informations nécessaires à la compréhension de la maladie et sur ses traitements ? 

L’annonce du diagnostic a été comme un soulagement car, auparavant, on mettait tout sur la psychosomatique et même mon entourage en était limite convaincue… 

Je ne connaissais pas du tout cette maladie. Je ne connaissais que sa cousine, la polyarthrite rhumatoïde. Le personnel du CHU de Tours a été super ! 

Je faisais de l’éducation thérapeutique, ce qui aide les patients à comprendre leurs maladies, à apprendre à se faire soi-même ses injections, à pouvoir parler de ses inquiétudes, etc... 

Quel est l’impact de la maladie sur votre vie professionnelle et privée ? 

La maladie m’a beaucoup pris… Trop je dirais avec le recul… J’ai d’abord perdu mon emploi puis mon logement car j'avais un logement de fonction. J’ai ensuite été aux Prud’hommes avec mon ancien employeur. 

J’ai ensuite vite perdu confiance en moi à cause des lourds traitements… J’ai pris 20kg. Puis, je me suis séparée du père de mon fils, nous étions ensemble depuis le lycée. Et, pour finir, c’est l’ensemble de ma famille qui s'est mise à prendre des distances car la maladie, le handicap fait fuir… tout ça en moins de 2 ans… 

Vos rapports avec votre entourage ont-ils changé depuis l’annonce du diagnostic ? Parlez-vous facilement de la maladie ? La comprennent-ils ? Vous sentez-vous entourée ? 

Les premières années cela à fait fuir tout le monde. J’ai essayé de faire comprendre ce que j’avais mais personne ne voyait ça comme quelque chose de grave parce-que je continuais à rire, à sourire, à me maquiller… 

J’ai tenu bon jusqu’en 2015, lorsque j’ai commencé à avoir mon cœur d’atteint (c’est rare mais cela arrive dans le cadre de la SPA). 

On a dû stopper mes traitements qui n’étaient plus compatibles et là, ça a été la descente aux enfers. Plus aucuns traitements n’agissaient sur la maladie. Je souffrais le martyr… Les morphiniques ont été doublés voire triplés… 

Puis, la perte de mon autonomie m’acheva… L’arrivée du fauteuil roulant… Je pensais avoir accepté la maladie depuis longtemps et là je me suis rendu compte que non, c’était un leurre… 

Ma mère m’a vue arriver en fauteuil roulant et là ça été l’électrochoc pour elle… Il a fallu en arriver là pour se dire que ce que j’avais ce n’était pas “rien”... Dans ma famille, les sentiments sont difficiles à verbaliser… 

Dernièrement, c’est ma vie qui a été en jeu et cela n’a rien changé, je pense malheureusement, qu’il faut vivre ainsi, j’ai cessé de courir après les gens. Le souci, c’est que les gens ne comprennent pas que l’on a qu’une vie et que ce n’est pas une fois la personne disparue qu’il faudra avoir des regrets...Profitez des gens que vous aimez ! 

Vous êtes active sur de nombreux réseaux sociaux. Pourquoi avoir décidé de parler de la spondylarthrite ankylosante sur Internet ? Quels thèmes abordez-vous ?  

Effectivement, je débute en 2014/2015 sur Facebook en créant “Spondylarthrite Ankylosante au Quotidien : Journal d’une Spondy” puis j’entreprends la création d’une chaine YouTube du même nom pour parler notamment de thèmes comme : “La maladie et l’entourage”, “Comment compléter un dossier MDPH”... Tout cela car, lorsque je me suis retrouvée avec mon diagnostic, je voulais absolument comprendre ce qu’allait être mon quotidien, mon avenir, etc. Or, on se retrouvait souvent sur des sites 100% médicaux avec un langage non adapté aux personnes n’ayant aucunes connaissances médicales… 

Alors je me suis servie de mes compétences professionnelles, de mes contacts dans le domaine de la santé pour créer un compte où l’on parlerait normalement et en toute franchise. Je me suis rendu compte que, pour beaucoup de malades, les médecins ne leurs parlaient pas des conséquences de cette maladie ou, parfois, ils étaient pris à la légère… 

Puis, en arrivant sur Instagram, j’ai développé le nom du compte en “Journal d’une spondy : les chroniques du quotidien”. Le mot “chronique” étant pour l’aspect maladies chroniques car je me suis vite rendu compte par mon expérience, mais aussi par celles de mes abonné.es, que nous étions énormément à cumuler plusieurs pathologies chroniques et que, forcément, en parlant entre nous, nous nous reconnaissions dans telle ou telle maladie. 

Depuis 2019, mon compte est à destination des personnes atteintes de spondylarthrite ankylosante mais aussi de la maladie de Crohn, de rectocolite hémorragique, syndrome d'Ehlers Danlos, psoriasis, polyarthrite rhumatoïde, lupus et toutes les autres maladies chroniques. 

Quel était votre constat avant de parler de la maladie sur Internet ? Manquait-il des informations essentielles à destination des patients ?

A vrai dire, on trouvait des forums sur Facebook mais c’était de tout et n’importe quoi. J’ai beaucoup de mal avec ce genre de groupes non encadrés, qui laisse dire des “il parait que" et des “on dit que”. Le reste, malheureusement, c’était du 100% médical avec beaucoup de mots bien complexes et l’absence de l’aspect humain derrière ces descriptifs. 

Pour finir, il y a aussi les pages/comptes de sportifs de haut niveau, d’influenceuses, de supers mamans tous atteints de la même maladie mais reflétant un aspect édulcoré, en ne partageant que du positif et jamais les crises de poussées inflammatoires, les effets secondaires des traitements, etc. 

Résultat ? On a tendance à se comparer et cela finissait par me déprimer et je me disais clairement que j’étais surement nulle en comparaison à toutes ces personnes très heureuses et prônant la positive attitude H24... 

En clair, cela manquait de réalité et c’est cela que recherche la plupart des malades ! 

Quels sont les retours des personnes qui vous suivent ? Recevez-vous des témoignages ? Selon vous et votre communauté, qu’est-ce qui est le plus difficile dans la gestion au quotidien de la spondylarthrite ankylosante ? 

Je reçois chaque jour des messages de remerciement pour avoir redonner le sourire ou juste pour avoir pris le temps de papoter ou de conseiller. Mais je remercie aussi beaucoup mes abonné.es d’être présents et de me faire confiance depuis toutes ces années

Alors, certes, mon compte ne comptabilise pas 10 000 abonnés car forcément mes posts sont orientés sur des anecdotes, des descriptifs de maladies chroniques… Mais bon, le principal c’est que ce compte soit utile et qu’il continue à aider au quotidien des malades pour monter leurs dossiers MDPH, pour annoncer leur maladie à leurs proches, pour comprendre en toute franchise ce qu’est leur maladie. 

Au quotidien, comme je le dis souvent, c’est souvent les autres notre plus gros handicap.  

Du fait que nous ayons des maladies dites invisibles, nous ne sommes pas “crédibles” au statut de personne en situation de handicap. On subit des remarques, des insultes, des moqueries, des discriminations et devoir se justifier de tout, c’est très épuisant !  

A tel point que nous sommes “gêné.es” de devoir montrer notre carte de prioritaire pour les caisses handicapées et que beaucoup n’osent plus se garer sur des places handicapées alors que l’on a la carte de stationnement adaptée… Tout ça à cause de la bêtise de certaines personnes…  

Puis, vient les aspects pas très cools de la maladie, c’est-à-dire le dérouillage matinal qui peut aller jusqu'à 2h. Cela veut dire que nous devons nous lever plusieurs heures avant tout le monde pour que l’on puisse s’habiller, bouger, etc...  

Il y a aussi tout le coté social que nous pouvons perdre à force de refuser les invitations le soir car, pour nous, c’est là où nous rencontrons le pic inflammatoire… 

Où en êtes-vous à l’heure actuelle ? Quels sont vos projets pour l’avenir ? 

Ces derniers mois, ma santé s’est vite dégradée, on m’a découvert une autre maladie auto-immune qui est le lupus

Avec le temps et avec toutes les pathologies que je cumule, j’ai appris à vivre au jour le jour. Mais en tout cas, j’ai décidé de vivre et faire ce qui me fait du bien et me rend heureuse. Je développe mon côté artistique, c’est ce qui m’apaise (le dessin, comme toute activité manuelle et créative, peut avoir un réel impact positif sur ce genre de maladie).  

Enfin, quels conseils aimeriez-vous donner aux membres Carenity également atteints de spondylarthrite ankylosante ? 

Premièrement, nous connaissons parfaitement notre corps, donc si vous sentez qu’il y a quelque chose qui ne va pas, consultez ! 

Deuxièmement, si vous ne vous sentez pas écouté, ou si on se moque de vos douleurs, changez de médecin ! 

Être atteint de spondylarthrite, c’est vire avec des douleurs chroniques mais, avec le temps, on arrive à savoir ce qui est bon pour nous ou pas, ne vous forcez jamais à faire quelque chose pour “faire plaisir” !

Être malade chronique demandera peut-être des aménagements mais, sachez, qu’il est possible de se reconvertir si l’emploi n’est plus adapté. La vie n’est pas finie, c’est juste une page qui se tourne ! 

Un dernier mot ? 

Dernièrement, j’ai dû faire face à de mauvaises attitudes de médecins qui m’ont profondément blessée et, en parlant avec mes abonné.es, je me suis aussi rendu compte que nous étions beaucoup à avoir subi de la maltraitance médicale. C ’est pourquoi je suis en train de récolter un maximum de témoignages pour la création d’un post puis une vidéo pour sensibiliser surtout quand on sait que l’errance médicale peut aller jusqu’à plus de 10 ans… 

N’hésitez pas à nous rejoindre sur Instagram !  


Un grand merci à Céline pour son témoignage ! 

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avatar Candice Salomé

Auteur : Candice Salomé, Rédactrice Santé

Créatrice de contenus chez Carenity, Candice est spécialisée dans la rédaction d’articles santé. Elle a une appétence particulière pour les domaines de la psychologie, du bien-être et du sport.

Candice est... >> En savoir plus

5 commentaires


nanouchkia
le 24/02/2022

Merci pour votre témoignage qui me rappelle mon parcours personnel vis à vis de la spondylarthrite. Je suis âgée de 74 ans et on a diagnostiqué ma maladie qu'en 2006, mon médecin traitant me prescrivant que des séances de kiné et des antidépresseurs durant des dizaines d'années. En 2006, devant ma souffrance, j'ai vu enfin un rhumatologue qui a enfin diagnostiqué la maladie avec le gène HLA B27. Maheureusement après un traitement pendant 7 ans, j'ai eu un cancer colorectal. J'ai arrêté tout traitement, la rhumatologue n'a dit qu'il était possible que ce cancer soit concomitant à mon traitement suivi pendant 7 ans pour ma maladie. Maintenant je ne suis plus de traitement lourd, simplement du doliprane journellement. Je fais des allergies à tout traiement à base de morphine et ou d'opium mais les douleurs sont de plus en plus importantes et invalidantes surtout pour mes déplacements. Je peux encore vivre seule mais je sais que cela ne va pas durer encore longtemps.



mati35
le 24/02/2022

Merci


Eilistraee
le 24/02/2022

Je suis Céline sur les réseaux sociaux depuis mon inscription sur insta en 2017 😊 nous avons presque le même parcours, presque le même âge... et la même volonté de ne pas laisser les autres dans "le noir" ! Allez jeter un coup d'oeil sur son instagram ! Cette nana est géniale 😉😊❤


genevieve1212 • Membre Ambassadeur
le 24/02/2022

Merci beaucoup pour ce témoignage très utile qui reflète mon parcourt et la souffrance de tout les jours


envie465
le 11/03/2023

cc Céline

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