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Le témoignage d'Elodie : “La sclérose en plaques ne me définit pas”

Publié le 11 juin 2025 • Par Candice Salomé

À 37 ans, Élodie, infirmière en pédiatrie et maman de deux enfants, a vu sa vie basculer avec le diagnostic de sclérose en plaques. Entre doutes, douleurs invisibles et traitements exigeants, elle raconte comment elle a fait face à cette réalité complexe. Au-delà de la maladie, c’est son quotidien, ses choix, ses passions — comme la course à pied et la photographie — qui dessinent sa nouvelle vie. Élodie nous invite à découvrir ce cheminement intime, fait d’acceptation, d’adaptation et d’envies toujours présentes, malgré l’incertitude. 

Le témoignage d'Elodie : “La sclérose en plaques ne me définit pas”

Tout d’abord, pourriez-vous commencer par vous présenter ?  

Je suis Élodie, 38 ans, mariée et maman de deux merveilleux enfants de 11 et 8 ans. Je suis infirmière, travaillant en pédiatrie et passionnée par mon métier. Dans la vie, j'ai d'autres passions : je suis une femme sportive, passionnée par le running, les randonnées dans la nature, et j'apprécie immortaliser ces instants grâce aux photographies. J'aime aussi beaucoup lire et m'enrichir à travers tous ces écrits. 

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Avec l'aimable autorisation d'Elodie

Pouvez-vous nous raconter le moment où vous avez reçu le diagnostic de la sclérose en plaques ? Qu’est-ce qui vous a poussée à consulter ? Quel a été votre premier ressenti ?  

À 37 ans, ma vie, jusqu’alors très paisible, a été bouleversée par ce diagnostic de sclérose en plaques

Pendant longtemps, j’ai ressenti des sensations étranges dans mon corps, que je mettais sur le compte du stress ou de la fatigue : le signe de Lhermitte, des vertiges, des paresthésies... 

En mai 2023, une douleur assez intense apparaît dans mon bras droit, laissant place, après quelques jours, à des fourmillements persistants dans trois doigts de ma main droite — ce que l’on appelle des paresthésies dans le jargon médical. 

Ces mêmes paresthésies touchent ma jambe droite depuis plusieurs années. 

Étant infirmière, cette perte de sensibilité au niveau de mes doigts me gêne énormément dans mon travail. Je décide donc de consulter mon médecin. 

Le diagnostic est difficile à poser. Je dois consulter à quatre reprises avant que l’on me prescrive une IRM, suspectant d’abord une hernie cervico-brachiale

Je me rends à cette fameuse IRM, sereine, seule. 

Le compte rendu final me bouleverse… 

Trois plaques sont visibles sur la moelle épinière. « Madame, vous devez consulter un neurologue rapidement ! » 

Je repars avec ces deux mots en tête : plaques et neurologue

Je suis anéantie. Même si le diagnostic n’est pas encore confirmé, je pense immédiatement à la sclérose en plaques. 

Nous sommes le 22 décembre 2023, et ma vie me paraît soudainement condamnée. 

Après une hospitalisation et de nombreux examens (IRM médullaire, IRM cérébrale, bilan sanguin, ponction lombaire...), le diagnostic est posé le 12 avril 2024 : je suis atteinte d’une sclérose en plaques récurrente-rémittente, une maladie auto-immune, incurable, neurodégénérative. 

Le choc. C’est le chaos. 

Je m’effondre, perds le goût de vivre, verse des océans de larmes. 

Je suis brisée en mille morceaux. 

Comment avez-vous réussi à surmonter cette première phase de choc ?  

Je suis très bien entourée, mais malgré tout, je me sens seule avec ma maladie. Je m’isole, ne pense qu’à ça. Les insomnies et les angoisses s’enchaînent. 

Je lis beaucoup d’études scientifiques sur le sujet. 

Je continue d’aller travailler, avec ce sourire forcé. Je porte le masque de la personne forte devant ma famille, mes enfants, mes amis, car je ne supporte pas leur tristesse. 

Puis, je décide de prendre contact, via les réseaux sociaux, avec d’autres personnes atteintes de cette même maladie — des personnes plutôt positives, qui me motivent et me prouvent qu’il est possible de continuer à vivre une vie presque normale. 

Cela m’aide à croire en la vie, et à avancer doucement sur le chemin de la résilience

Quelles sont les principales difficultés que vous rencontrez au quotidien avec la sclérose en plaques ? 

Ne pas la maîtriser… 

Il y a des jours où mon corps est épuisé. Mais pas d’une simple fatigue : c’est une fatigue intense, écrasante, comme si je portais une chape de plomb. Tout devient difficile. 

Mes symptômes, notamment les paresthésies, s’exacerbent sur tout mon côté droit. S’y ajoutent des sensations de vertige, des névralgies faciales et des troubles visuels. 

Mais il y a aussi tous les autres jours, ceux où tout semble plus léger — et alors, j’en profite pleinement. 

Elle m’impose ses pauses, mais je suis déterminée à lui imposer ma vie

C’est un handicap invisible, qui fluctue d’un jour à l’autre, d’une heure à l’autre, avec des symptômes qui varient d’une personne à l’autre. 

Et cette impression de ne pas être légitime reste difficile à vivre. 

Elle est là, on ne la voit pas, et j’apprends à vivre avec. 

C’est un combat discret, de chaque instant. 

Comment se déroule votre prise en charge médicale aujourd’hui ? Avez-vous un suivi régulier, des traitements adaptés ?  

Tout d’abord, j’ai la chance de pouvoir être suivie dans un CHU près de chez moi.

La maladie rythme ma vie — par ses symptômes, bien sûr, mais aussi par le suivi régulier qu’elle impose : rendez-vous chez le neurologue tous les six mois, IRM de contrôle chaque année, et traitement nécessitant un suivi constant, entre bilans sanguins, consultations chez le dermatologue et chez la gynécologue.

On nous laisse le choix du traitement, mais c’est un véritable dilemme — un choix cornélien entre la peste et le choléra, car tous entraînent des effets secondaires importants. J’ai opté pour un traitement injectable à administrer tous les quinze jours. Je réalise ces injections moi-même, en autonomie. Me faire mes propres injections n’est pas anodin : c’est cette double vie que je mène, entre mon rôle d’infirmière et celui de patiente, à qui je dois apprendre à prendre soin. 

Vous évoquez une force que vous ne pensiez pas avoir. D’où vient-elle selon vous ? Avez-vous des sources d’inspiration ou des soutiens particuliers ?  

Après m’être écroulée, un an plus tard, je suis en pleine reconstruction. J’ai décidé de me battre et de faire de cette maladie une force. Mes soutiens de tous les jours — ma famille, mes amis — ne m’ont jamais laissée tomber. Je suis chanceuse d’être si bien entourée

J’ai également reçu beaucoup de soutien de personnes atteintes de la même maladie. Nous échangeons régulièrement. Elles m’ont écoutée, soutenue, motivée. 

À travers leurs histoires, j’ai découvert leur résilience face à la maladie, leur volonté de ne rien lâcher. 

De là est née une force insoupçonnée

Pourquoi pas moi ? Pourquoi n’aurais-je pas, moi aussi, le droit de vivre mes rêves ? 

J’ai pris conscience qu’elle serait ma compagne de chaque jour, mais qu’en aucun cas elle ne pourrait m’empêcher de vivre pleinement

La sclérose en plaques m’a fait grandir. Elle m’a appris que la vie, c’est maintenant. 

Un grain de folie enfoui en moi a jailli, et tous mes rêves les plus fous sont remontés à la surface. 

La vie est précieuse. Oui, je suis malade. Mais je peux encore vivre une vie merveilleuse. 

La maladie ne nous définit pas : elle peut, au contraire, nous rendre plus forts. 

La pratique de la course à pied fait partie de votre thérapie. En quoi le sport vous aide-t-il physiquement et mentalement ? 

Le sport m’a littéralement sauvée. Il a été ma bouée de sauvetage au moment où je perdais pied. La course à pied fait partie intégrante de ma thérapie : c’est mon médicament, mon exutoire, mon psychologue. Quand je cours, je me sens bien, apaisée, debout, maîtresse de mon corps — et surtout, plus forte qu’elle, pour l’instant. J’ai besoin de me challenger, de me prouver que mon corps est encore capable

Je suis finisheuse du marathon de Paris 2025 : une véritable victoire face à la maladie. 

Mais courir, ce n’est pas seulement dépasser mes limites : c’est aussi une parenthèse dans mon quotidien, un moment à moi, loin du stress, qui m’apaise et m’aide à mieux vivre. Physiquement, cela me renforce et soulage certaines douleurs, comme les raideurs ou les névralgies. 

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Avec l'aimable autorisation d'Elodie

Comment gérez-vous les fluctuations du moral et les « jours sans » ? Avez-vous développé des stratégies spécifiques pour traverser ces moments difficiles ?  

Aujourd’hui, je commence ma deuxième vie avec elle, avec toutes ses incertitudes et ces questions sans réponse sur mon avenir. 

Bien sûr, il y a des jours sans — et je crois que ce sont les plus difficiles à vivre. 

Il faut accepter qu’elle prenne parfois le dessus. 

Ces jours-là, j’ai compris que je devais me reposer et prendre soin de mon corps, pour mieux repartir ensuite. 

J’accepte aussi les baisses de moral qui vont avec. Je m’autorise à pleurer, à laisser sortir toute cette colère en moi… 

Car oui, je lui en veux de m’empêcher de profiter pleinement de certains moments de bonheur avec mes proches. 

Elle est là pour toujours, et malheureusement, elle impacte ma vie. 

Alors, je me blottis sous un plaid, je lis un bon livre, un thé à la main, et je me repose. 

J’ai appris à dire non, à écouter mon corps et à lui offrir ce dont il a besoin. 

Je colorie souvent : cela m’apaise énormément. 

J’ai découvert la réflexologie plantaire, un véritable moment de bien-être. 

Et puis, j’ai mis en place un petit rituel : un journal de gratitude

Chaque jour, j’y note deux petits bonheurs vécus dans la journée

Les relire lors des jours plus sombres me fait un bien fou. 

La sclérose en plaques est souvent une maladie imprévisible. Comment vivez-vous avec cette incertitude au quotidien ?  

Le soleil revient toujours. Parfois, cela prend des jours… parfois des semaines. Mais il finit toujours par revenir. Un pas après l’autre, et toujours y croire. 

Même si c’est un long travail sur soi, il faut essayer de penser positif. Cette maladie est sournoise, imprévisible, et elle évolue différemment pour chacun. Mais il faut garder espoir : la médecine progresse, les traitements deviennent de plus en plus efficaces. Alors oui, l’avenir me fait peur. 

J’espère de tout mon cœur ne jamais finir en fauteuil roulant. Mais j’essaie de ne pas trop y penser, de ne pas me projeter trop loin. Je choisis de vivre l’instant présent, en espérant que l’avenir me réserve de belles surprises. Je veux y croire, je veux vivre mes rêves les plus fous. Oui, aujourd’hui, je veux vivre ma vie à 300 %. 

Parce que je vis avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Parce que mon avenir est incertain… mais ma soif de vivre, elle, est bien réelle  

Enfin, quels sont vos rêves ou projets d’avenir ?  

2025 est l’année de ma renaissance. Je souris à nouveau… mais cette fois, avec un vrai sourire. Je commence à ne plus penser à la sclérose en plaques chaque jour, et quel soulagement. 

En août, je ferai mon tout premier saut en parapente. En septembre, je me lancerai dans un trek autour du Mont Blanc pendant quatre jours. 

Oui, la sclérose en plaques a bouleversé ma vie. Mais un an après le diagnostic, un grain de folie est apparu. Et je n’aurais jamais cru dire ça un jour, mais… sans elle, je n’aurais peut-être jamais osé relever tous ces défis. Elle me pousse à me dépasser. Elle me pousse à réaliser mes rêves les plus fous. 

Je suis toujours la même personne, simplement… avec elle en plus. Elle ne me définit pas. Mais j’ai compris qu’elle pouvait devenir une force, un moteur, un petit « plus » dans ma vie. Elle m’aide à prendre confiance en moi, à oser, et à devenir pleinement celle que je suis aujourd’hui. 

Quels conseils donneriez-vous à une personne qui vient d’être diagnostiquée aujourd’hui ?  

À vous qui venez tout juste d’être diagnostiqué : le chemin est sinueux, parsemé de montagnes russes émotionnelles. Et c’est normal. Laissez-vous du temps. Et surtout, acceptez le soutien, même s’il est parfois maladroit. Entourez-vous, ouvrez-vous. 

Trouvez ce qui vous fait vibrer, ce qui vous fait du bien. Gardez espoir. N’abandonnez jamais vos rêves, car le plus important, c’est de vivre. Oui, il y aura des hauts et des bas. Mais les hauts deviendront magnifiques. Quand on est touché par la maladie, la vie prend une autre saveur

La sclérose en plaques nous apprend à savourer chaque instant, à voir la beauté dans les choses simples, à aimer plus fort, plus vrai… parce qu’on sait que tout est fragile. 

Je vous souhaite de tout cœur de trouver votre échappatoire, celle qui rallumera les étoiles, celle qui vous aidera à avancer. 

Un dernier mot ?  

Je terminerai mon témoignage par cette citation: "Quand la vie nous donne toutes les raisons de baisser les bras, trouvons tous les moyens pour les maintenir si haut jusqu'à toucher le ciel" (Esther Johnson)  

Ensemble on est plus fort ❤️

Un grand merci à Elodie pour son témoignage !    
  
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avatar Candice Salomé

Auteur : Candice Salomé, Rédactrice Santé

Créatrice de contenus chez Carenity, Candice est spécialisée dans la rédaction d’articles santé. Elle a une appétence particulière pour les domaines de la psychologie, du bien-être et du sport.

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