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« Je serai bipolaire jusqu’à ce qu’on m’enterre, mais je suis rétablie » : le témoignage plein d’espoir de Paule-Rose

Publié le 23 avr. 2025 • Par Candice Salomé

À 31 ans, Paule-Rose (@une.trentenaire.bipolaire sur Instagram) se définit comme sociable, optimiste, et pleine de vie. Juriste de formation, elle vit aujourd’hui avec son compagnon et leur chat, dans un cocon où règnent amour et soutien mutuel. Mais derrière son sourire et sa sensibilité au monde qui l’entoure, Paule-Rose vit avec un trouble bipolaire de type 1, diagnostiqué à l’âge de 24 ans. 

Dans ce témoignage sincère et profondément humain, elle revient sur son parcours, les hauts et les bas de la maladie, mais aussi les projets qui lui donnent de l’élan : l’écriture d’un livre, la pair-aidance, et le rêve de devenir maman. 

« Je serai bipolaire jusqu’à ce qu’on m’enterre, mais je suis rétablie » : le témoignage plein d’espoir de Paule-Rose

Bonjour Paule-Rose, vous avez accepté de témoigner pour Carenity et nous vous en remercions. 

Tout d’abord, pourriez-vous nous en dire plus sur vous ? 

Je m’appelle Paule-Rose et j’ai 31 ans. Juriste de formation, je suis actuellement sans emploi. Je suis pacsée à un homme que je qualifierais de merveilleux, de très soutenant et nous vivons dans un appartement avec notre petit chat gris. 

Je suis de nature sociable et optimiste. J’aime être entourée. 

Certaines personnes ont déjà pu me comparer à une « éponge émotionnelle » ; en effet, je suis sensible à mon environnement et aux ondes qui s’en dégagent. 

J’aime les rencontres, mes amis et ma famille. 

J’aime découvrir de nouvelles choses. J’aime les sorties. 

Je déteste la routine à tel point que je ne l’ai jamais connue. 

Vous êtes atteinte de bipolarité de type 1, pourriez-vous nous en parler ? Quelles sont les principales manifestations de la maladie ? 

En effet, je suis porteuse d’un trouble bipolaire de type 1. Cela entraine, sur certaines périodes de ma vie, des fluctuations anormales d’humeur, à savoir de la manie et de la dépression

Lorsque ma vie devient stressante et incertaine, je commence à « grimper » émotionnellement. Cela se caractérise d’abord par une perte d’appétit et un besoin de sommeil très réduit. Puis, je me mets à faire des associations d’idées douteuses, à avoir des délires… 

Pour vous donner un exemple, j’ai déjà été persuadée de posséder un pouvoir selon lequel, en regardant dans les yeux des personnes, je pouvais leur donner l’impulsion d’aller là où ils devaient être (en prison, à l’hôpital…) ; ce pouvoir m’aurait permis de rendre le monde juste et parfait. 

Mes délires m’ont également permis d’avoir la chance de voir la Vierge Marie…. 

Quelques semaines après cette phase maniaque, mon cerveau étant épuisé, je tombe en dépression avec idées noires voire suicidaires

En dehors de ces phases dépressives et maniaques, je parviens à avoir une humeur stable et mener une vie à peu près normale. Toutefois, au quotidien, je me sens davantage fragile que la population générale. En effet, il peut m’arriver d’avoir des résidus de la maladie même en période euthymique (période stable). Il n’y pas si longtemps que cela, durant une semaine entière, j’ai souffert de symptômes dépressifs très intenses. 

J’ai également des problèmes de mémoire, de la fatigue, des prises de poids anormales… Autant d’effets secondaires qui handicapent le quotidien. 

C’est lorsque vous étiez âgée de 24 ans que la maladie a fait son apparition dans votre vie. De quelle façon ? Et pourquoi, selon vous ? 

A 24 ans, je vivais sur l’ile de la Réunion dans une grande colocation. J’avais un rythme effréné entre le travail, les sorties, les rencontres amicales, les randonnées… 

Mes parents ont débarqué dans mon quotidien pour m’annoncer qu’ils allaient se séparer. Ce jour-là et les jours qui ont suivi, je n’ai pas pleuré. Or, je suis émotive. A la place de ces larmes, un raz-de-marée se préparait. Raz-de-marée qui m’amena direction l’hôpital psychiatrique pour plusieurs jours avant que je ne rentre en métropole. 

Le déclenchement de cette maladie est, je pense, multifactorielle. J’ai subi un choc émotionnel du fait de l’annonce de la séparation de mes parents, j’ai également un facteur génétique qui ne m’a pas aidée, et j’ai aussi eu une hygiène de vie qui était favorable à l’apparition d’un trouble psychique (peu de sommeil, trop d’alcool…). 

Par la suite, vous avez fait d’autres « bouffées délirantes ». Comment se manifestent ces bouffées et quelle était votre prise en charge durant cette période ? 

Oui, des bouffées délirantes comme elles ont été appelées à l’époque. Il s’agissait en fait de phases maniaques. Je le saurai un peu plus tard. 

J’ai fait 3 importantes phases maniaques en 2018, 2019 et 2021. Toutes, ont nécessité des hospitalisations et elles se sont toutes déclenchées au mois de mai-juin. 

Lorsque je rentre dans une phase de manie, je deviens incontrôlable, déraisonnée, déraisonnable… 

En 2021, vous avez connu une hospitalisation sous contrainte, pourriez-vous nous en parler ? 

Deux mois d’hospitalisation sous contrainte. 

Je n’oublierai jamais cette année, elle est gravée dans ma tête et sur mon corps : j’ai en effet décidé de me faire percer l’oreille droite. 

Jugée dangereuse pour moi ou les autres, j’ai été isolée du monde pendant plusieurs jours pour ne pas dire enfermée dans une petite chambre sans aucun contact avec l’extérieur (absence d’appels, de visites…) et même un accès limité à l’eau. 

Malgré le côté traumatisant de cette hospitalisation, cette dernière a permis de poser un mot sur le mal qui me ronge : la bipolarité de type 1 et de trouver un traitement qui me stabilise : un antipsychotique et un régulateur d’humeur. 

Quel est votre suivi et votre prise en charge actuellement ? Comment vous sentez-vous ? 

Actuellement, je vois ma psychiatre une fois tous les quinze jours. Même si je vais bien depuis un moment maintenant, ces consultations sont devenues vitales et me rassurent. 

Je me permets de dire que je suis rentrée dans la case « rétablie » mais évidemment pas guérie

Je serai bipolaire jusqu’à ce qu’on m’enterre mais j’ai décidé que cette maladie n’allait pas régir ma vie. Alors, pour répondre à votre question, je dirais que je vais bien. Je me sens, malgré tout, chanceuse de vivre, reconnaissante, amoureuse, épanouie, entourée et soutenue par mes proches… 

En 2023, vous décidez d’écrire un livre autobiographique, pourquoi avoir fait ce choix ? Qu’est-ce que cela vous apporte ? Allez-vous le faire publier ? 

Je n’ai pas vraiment décidé d’écrire un livre autobiographique, cette idée est venue à moi comme une évidence. J’aime écrire depuis toute jeune. 

Et j’ai donc été prise, le 17 novembre 2023, d’une envie irrépressible de partager mon vécu, d’avoir la sensation de choses à dire

Cela m’apporte beaucoup. En premier lieu, je dirais que cela m’a aidée dans mon rétablissement et surtout cela m’a permis de prendre conscience du chemin parcouru depuis plus de 6 ans maintenant. 

Je souhaite publier ce livre dans les mois à venir. Si un éditeur me lit, qu’il n’hésite pas à me contacter ! 

Vous allez débuter une formation sur la pair-aidance. Pourriez-vous nous en dire plus ? 

Ce projet de pair-aidance me tient à cœur depuis plusieurs années. 

Tout comme mon livre autobiographique, il m’apparait évident que j’ai une volonté et une envie d’aider mes pairs. 

En parallèle du savoir académique du personnel de santé, le pair-aidant apporte son partage d’expérience, de vécu, de connaissances de la maladie. 

Ce dispositif est encore trop peu utilisé de nos jours mais j’ai la sensation qu’il sera amené à se développer. Cela me semble tellement intelligent et logique. 

Quels sont vos projets pour l’avenir ? 

Mon gros projet est celui d’avoir un enfant avec mon conjoint

Je ne pensais pas, quand je suis tombée malade, que cela allait avoir des impacts sur ma future maternité. 

Effectivement, il s’agit de trouver un traitement adapté (le traitement que je prends actuellement semble être le mieux dans ma situation mais il peut entrainer des malformations cardiaques au bébé). Il s’agit également de prendre le risque de rechuter en étant enceinte ou en post- accouchement, de prendre le risque que mon enfant développe la même maladie que moi. 

Mais, l’envie de donner la vie est plus forte que tout. 

D’un point de vue professionnel, mon projet est de trouver un emploi en tant que pair-aidante dans une structure. 

Un dernier mot ? 

Espoir ! 

C’est ce qui m’a permis de tenir lors de moments compliqués et je pense que c’est le mot-clé de tout rétablissement. Croire que cela peut s’arranger, croire que l’on peut tirer profit de situations difficiles, croire tout simplement. 

Merci chaleureusement de m’avoir permis de m’exprimer. 

Paule-Rose. 

Un grand merci à Paule-Rose pour son témoignage !   
 
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Auteur : Candice Salomé, Rédactrice Santé

Créatrice de contenus chez Carenity, Candice est spécialisée dans la rédaction d’articles santé. Elle a une appétence particulière pour les domaines de la psychologie, du bien-être et du sport.

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