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Maladie de Castleman et VIH : focus sur le virus HHV-8

Publié le 15 janv. 2021 • Par Charlotte Avril

La maladie de Castleman est une maladie non cancéreuse des ganglions et non maligne. Maladie à la fois non transmissible et non héréditaire, il en existe plusieurs formes distinctes aussi bien dans leur présentation que dans leur prise en charge. 

Affection rare de cause incertaine, de nombreuses questions restent à ce jour sans réponse à son sujet et les chercheurs travaillent à faire progresser la compréhension de cette maladie et sa prise en charge. Si vous le souhaitez, vous trouverez des informations plus détaillées sur les avancées actuelles de la recherche dans la maladie de Castleman dans l’article “Maladie De Castleman - Où en est la Recherche ?”

Quels liens existent-ils entre la maladie de Castleman associée à l’HHV-8 et l’infection au virus de l'immunodéficience humaine (VIH) ? Quelles sont les conséquences d’une co-infection et comment la traite-t-on ?

On vous dit tout dans notre article !

Maladie de Castleman et VIH : focus sur le virus HHV-8

Un risque plus élevé pour les patients séropositifs au VIH

Bien que la maladie de Castleman multicentrique (MCM) soit rare, le risque de contracter cette maladie est plus important chez les patients séropositifs au VIH. Une raison à cela réside dans le fait que ces personnes ont un système immunitaire affaibli par l’infection au VIH, et de la présence quasiment systématique associée de l’herpèsvirus humain 8 (HHV-8) dans les cas de maladie de Castleman diagnostiquée (MC). Plusieurs études mettent en relation le HHV-8 avec la MCM et ont montré que le HHV-8 peut aussi infecter des cellules du système immunitaire en empêchant leur développement normal. Ceci explique qu’une co-infection au VIH, lui-même affaiblissant le système immunitaire, engendre une plus forte probabilité de développer une MCM et des maladies associées.

Qu'est-ce que l’HHV-8 et comment se transmet-il ?

L’HHV-8 est un virus de la famille des herpesviridae, à ADN double-brin enveloppé, de la sous-famille des Gammaherpesvirinae et du genre Rhadinovirus. C’est le seul Rhadinovirus connu chez l’homme. D’après les statistiques documentées, ce virus, à l’instar du VIH, touche tout particulièrement les hommes de la communauté homosexuelle et affecte aussi plus sévèrement les personnes originaires de pays à forte prévalence pour ce virus (d’Afrique principalement).

Bien qu’elles restent imparfaitement connues, il semblerait que les voies prépondérantes de transmission du HHV-8 soient la voie salivaire et la voie sexuelle. En effet, les rapports oro-génitaux sont considérés comme particulièrement contaminants ainsi que la transmission par contact direct ou encore via des gouttelettes (éternuements, postillons, etc.), aussi appelée transmission horizontale. Enfin, il semblerait qu’il y ait un risque lors de la transplantation d’organes. Etant donné que la séroprévalence à ce virus augmente avec l’âge, cela laisse penser qu’un autre moyen de transmission existe mais celui-ci n’est pas encore identifié actuellement.

Comme tous les herpèsvirus, l’HHV-8 est latent dans la plupart des cellules qu’il infecte et est donc le plus souvent asymptomatique lorsque le système immunitaire fonctionne correctement. Dans le cas inverse, différentes complications peuvent apparaître. 

Les syndromes associés à l’HHV-8

Ils sont au nombre de trois désormais associés au virus, dont un plus courant : le sarcome de Kaposi.

Le sarcome de Kaposi existe sous différentes formes qui peuvent soit se développer de manière indépendante du virus du SIDA soit, le plus fréquemment, chez les patients co-infectés par le VIH et l’HHV-8 : on observe cette association jusqu’à 75 % des cas. Nous avons ainsi pu voir une forte croissance du nombre de cas de sarcome de Kaposi suite à l’épidémie de SIDA, notamment sur le continent africain où le virus HHV-8 est présent de façon endémique. Le sarcome de Kaposi (SK) est un désordre angioprolifératif de l’endothélium vasculaire qui se présente sous forme de tumeurs cutanées, la maladie pouvant parfois atteindre les ganglions et les viscères.

Un autre syndrome, très rare, associé à l’HHV-8 est le lymphome primitif des séreuses (LPS) (ou lymphome des cavités). Celui-ci est caractérisé par des épanchements de liquide pleural, péritonéal et péricardique dans lesquels on peut retrouver des cellules cancéreuses. Cet épanchement est à l’origine des principaux symptômes : une dyspnée concernant les localisations cardiaque ou pulmonaire et une distension abdominale quand il s’agit d’une localisation péritonéale. En termes de pronostic, celui-ci est plutôt défavorable, d’autant plus lorsque la maladie est couplée à une infection au VIH (ce qui représente la majorité des cas) du fait de la dégradation du système immunitaire qui favorise grandement sur l’apparition et l’évolution de la maladie.

Enfin, comme évoqué auparavant, le virus HHV 8, que l’on peut retrouver dans les ganglions ou le sang, constitue également une origine potentielle de la maladie de Castleman multicentrique (MCM). Pour en savoir plus sur la MC, ses différentes formes, les symptômes et les traitements possibles, nous vous invitons à lire notre article “Maladie de Castleman: tout ce que vous devez savoir !”. Des études ont montré que la MCM du patient atteint de VIH est constamment associée à l’infection au l’HHV-8 alors que cette dernière n’est observée que dans seulement la moitié des formes de MCM sans infection par le VIH. Aussi, il est important de préciser que les formes couplées à l’HHV-8 sont plus graves, avec un pronostic plus sévère et des symptômes systémiques plus fréquents. L’évolution rapide et la difficulté concernant le diagnostic dans certaines de ces régions du monde, en particulier en Afrique, sont les raisons qui expliquent que, tout comme pour le lymphome primitif des séreuses (LPS), la prévalence de la MCM est assez mal connue dans ces zones de forte endémie virale.

La MCM est fortement liée au VIH et est souvent associée à la maladie de Kaposi voire, dans quelques cas, à un LPS, en particulier chez des patients immunodéprimés. En ce qui concerne le pronostic d’un MCM isolé, celui-ci s’est nettement amélioré depuis l’introduction des traitements actuels. Toutefois, dans les cas les plus graves, en association avec d’autres syndromes cités par exemple, le pronostic peut vite devenir défavorable et le décès survient souvent par survenue d’un lymphome de haut grade et d’une défaillance multi-viscérale.

La Maladie de Castleman (MC) associée à HHV-8 dans un contexte d’infection au VIH : présentation et traitement

Dans un contexte d’infection au VIH, la présentation de la maladie est superposable à celle des formes sévères de la MC multicentrique idiopathique, toutefois les complications possibles, toutes répertoriées dans le Protocole National de Diagnostic et de Soins (PNDS) concernant la MC de la Haute Autorité de Santé (HAS), sont les suivantes : 

  • Syndrome d’hémophagocytose (fréquent) :  
  • Anémie avec stigmates d’hémolyse (diminution et destruction des globules rouges), thrombopénie (diminution des plaquettes) et parfois pancytopénie (état morbide incluant à la fois une diminution des plaquettes, des globules rouges et des globules blancs). 
  • Hyperferritinémie et hypertriglycéridémie très évocatrices du syndrome.
  • Défaillance multiviscérale rapide possible et d’évolution fatale.
  • Cytopénies auto-immunes plus marquées.
  •  Anémie hémolytique auto-immune (AHAI) : maladie du sang qui se caractérise par une diminution anormale du nombre de globules rouges.
  •  Purpura thrombopénique immunologique (PTI) : destruction périphérique des plaquettes dans le cadre d'un processus auto-immun.
  • Maladie de Kaposi : sa présence facilite souvent le diagnostic de la MCM.
  • Lésions cutanées ou muqueuses spécifiques.
  • Atteinte viscérale digestive ou pulmonaire.
  • Œdèmes et épanchements séreux : ici on peut retrouver un LPS comme évoqué précédemment ou des œdèmes s’accompagnant de pleurésie (infection de la plèvre au niveau du poumon).

Le diagnostic est facilement évoqué lorsqu’il existe une de ces complications, en particulier des lésions de Kaposi, ou si le virus HHV-8 est détectable dans le sang (par PCR quantitative).

En ce qui concerne le traitement d’une MC dans un contexte d’infection au VIH, il faut prendre en compte le contrôle de la réplication virale 
(charge virale plasmatique) et la sévérité du déficit immunitaire (taux de lymphocytes T CD4+ ). Il faut également procéder à l’évaluation 
d’une éventuelle maladie de Kaposi clinique car cela jouera sur le traitement. 

Le schéma suivant, provenant aussi du PNDS de la HAS, indique les traitements à mettre en place selon la situation du patient.

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Source : Protocole National de Diagnostic et de Soins (PNDS) concernant la maladie de Castleman de la Haute Autorité de Santé (HAS) (2019)

Ainsi : 

  • En l’absence de Kaposi évolutif et dans un contexte d’infection HIV traitée et contrôlée avec un taux de lymphocytes T CD4+ > 50/mm3, le traitement repose sur le schéma R-VP16 (rituximab/etoposide) de 4 cycles hebdomadaires (Niveau 4, Catégorie 2A). 
  • En l’absence de Kaposi évolutif mais dans un contexte d’infection HIV non contrôlée ou avec un taux de lymphocytes T CD4+ < 50/mm3, le traitement associe l’etoposide qui peut être utilisé en voie orale sur un rythme hebdomadaire (70- 100 mg/m2 ) et l’introduction ou optimisation du traitement antirétroviral (ARVx). Dès lors que la charge virale est contrôlée et le taux de lymphocytes T CD4+ > 100/mm3 , il est possible de proposer le schéma R-VP16. 
  • Chez un patient présentant une maladie de Kaposi évolutive mais un contexte immuno-virologique satisfaisant, le traitement associe rituximab et doxorubicine liposomale (Niveau 4, Catégorie 2B). 
  • Chez un patient présentant une maladie de Kaposi évolutive et une infection HIV non contrôlée ou un taux de lymphocytes T CD4+ < 50/mm3, on préférera une association etoposide / doxorubicine liposomale associée à l’introduction ou l’optimisation du traitement antirétroviral (ARVx).

Comment prévenir la Maladie de Castleman associée à HHV-8 ?

Pour prévenir une infection à HHV-8, cela passe par des techniques simples. Comme le virus est peu résistant en milieu extérieur, il suffit en effet de respecter des règles d’hygiène basiques, comme le lavage des mains régulier, pour en limiter la transmission. D’autre part, partant d’un constat que les rapports oro-génitaux et oro-anaux représentent des risques majeurs de contamination, l’utilisation du préservatif ou d‘une digue dentaire est fortement recommandé.

Le dépistage du HHV-8 est aussi un outil essentiel dans la prévention de la maladie, notamment pour identifier les porteurs asymptomatiques du virus. Il faut aussi souligner que la prévention de la MC, mais aussi et surtout des complications, passe par le dépistage du VIH. La prise d’un traitement antirétroviral peut également s'avérer nécessaire dans certains cas pour que le système immunitaire des patients concernés puisse lutter contre le HHV-8.

Pour aller plus loin :

N’hésitez pas à vous rendre sur le site du CDCN (Castleman Disease Collaborative Network) pour plus d'informations. Ce site est disponible en anglais uniquement.

Vous pouvez également rejoindre la communauté “Maladie de Castleman” sur Carenity pour partager votre expérience, trouver du soutien et échanger de l’information avec d’autres patients ou proches de patients.

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