Dépistage du cancer : bientôt une consultation à 25 ans
Publié le 10 avr. 2018
Les médecins généralistes ont découvert lors de leur congrès annuel à quoi devrait ressembler cette consultation de prévention destinée aux jeunes femmes, et qui servira à mieux faire connaître les facteurs de risque et à apprendre à les éviter.
En avril 2017, juste avant de quitter le ministère de la Santé, Marisol Touraine avait annoncé la création d’une consultation dédiée à la prévention de tous les cancers et notamment du cancer du col de l’utérus et du sein (il existe un troisième cancer pour lequel un dépistage est organisé en France, le cancer colorectal). Projet repris six mois plus tard dans la loi de financement de la Sécurité sociale par son successeur Avenue de Ségur, Agnès Buzyn, ancienne directrice de l’Institut national du cancer.
À 25 ans, une consultation dédiée "dépistage et prévention" va donc être proposée aux femmes, avec une prise en charge à 100 % par l’Assurance-maladie, mais uniquement pour la prévention des cancers du sein et du col de l’utérus. "Rien n’est construit actuellement, tout est en réflexion", a cependant précisé jeudi Nathalie Catajar, du département dépistage de l’Institut national du cancer (Inca), devant plusieurs centaines de médecins réunis à Paris en congrès annuel sous l’égide du Collège de la médecine générale (CMG).
Rien n’est construit mais les pistes évoquées dessinent tout de même assez précisément à quoi devrait ressembler la future consultation dédiée. "Les jeunes femmes doivent être sensibilisées le plus précocement possible aux facteurs de risque de ces cancers et à l’intérêt du dépistage. Celles qui ont des facteurs de risque aggravés, souvent familiaux, doivent être identifiées le plus tôt possible", avait indiqué Agnès Buzyn à l’Assemblée nationale en octobre 2017.
Des facteurs de risques
Et c’est bien dans cette optique que l’Inca et les agences sanitaires soutiennent un nouveau travail du Centre international de recherche sur le cancer de Lyon (Circ) sur "les parts attribuables de risque de cancer liées au mode de vie et à l’environnement". Il devrait être publié en juin prochain mais les généralistes en ont découvert des éléments en primeur. Un peu cruellement, eu égard à la quasi-absence d’une réelle politique de lutte contre l’alcoolisme dans le plan de prévention récemment annoncé par le premier ministre, Édouard Philippe, on y verra l’écrasant poids de l’alcool et du tabac, comptant pour plus de la moitié des 140.000 cancers évitables en 2015. "Le risque de cancer du sein augmente même avec un seul verre d’alcool par jour", a rappelé Antoine Deutsch, du département prévention de l’Inca.
On y verra aussi, schéma à l’appui, le sinistre décompte organe par organe du nombre de cancers attribuables à divers facteurs de risque. "Pour le tabac, par exemple, est-il détaillé, on voit que c’est dix-sept localisations de cancers." On découvre aussi que pour les femmes, sur 15.000 des cas de cancer annuels attribués au tabac, 7.200 concernent le poumon, 2.400 le sein et 1.300 la bouche et le pharynx. Plus étonnant peut-être pour les femmes, le fait que 8.100 cancers du sein soient attribués chaque année à l’alcool et 2.100 cancers colorectaux, sur un total de 12.000 cancers, attribuables à l’alcool.
"L’éducation à la santé nécessite une information simple et fiable pour la population", peut-on lire dans le document de présentation de la stratégie nationale de santé 2018-2022, présentée par Agnès Buzyn. À écouter les interventions lors du congrès, l’austère document sur le "Dépistage des cancers du sein: s’informer et décider" n’a pas convaincu les médecins présents. Édité en septembre 2017 par l’Inca, ce document n’a ni image ni schéma explicatif.
Plus de recours à la mammographie
"Nous sommes moins dans la promotion de la mammographie et davantage dans l’information, mais ce qui est écrit est vrai", s’est défendu Nathalie Catajar à un généraliste qui regrettait "le langage stigmatisant du document lorsqu’il est par exemple écrit que 'Si vous développez un cancer du sein et si vous n’avez pas réalisé régulièrement un dépistage, il sera diagnostiqué à un stade plus avancé'". Les médecins attendent clairement des outils mieux adaptés pour accompagner leurs consultations. Et actualisés rapidement! Ainsi, le document de l’Inca concernant le dépistage du cancer de la prostate, toujours disponible sur le site, continue d’affirmer que les résultats des deux grandes études internationales sur le sujet sont contradictoires alors qu’une correction des biais montre au contraire qu’ils convergent vers une réduction de mortalité de 25 % à 32 %, grâce au dépistage, avec un recul de onze années.
De l’information sur la prévention et le dépistage, il devrait donc y en avoir - beaucoup - dans une consultation dédiée. "C’est ce qu’ont demandé les femmes, notamment en direction des jeunes, lors de la concertation citoyenne et scientifique sur le dépistage du cancer du sein qui a été menée en début d’année", a rapporté Sandrine de Montgolfier (Université Paris Est-Créteil-Val de Marne) membre du comité d’orientation de la concertation. Mais Nathalie Catajar ne cache pas le défi qui attend les médecins de famille à une époque ou le paternalisme médical est terminé: "L’enjeu sera de trouver un équilibre entre un contact purement informatif et engager la patiente dans des changements de comportement."
Le Figaro Santé
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