Biotrial : dès le 10 janvier, l'état du patient était inquiétant
Publié le 11 mars 2016
Selon un document qu'a consulté Le Figaro , le volontaire présentait déjà des symptômes neurologiques très préoccupants.
C'est un point capital pour l'enquête judiciaire. Depuis le début de l'affaire, Biotrial, qui réalisait un essai clinique pour le compte du laboratoire portugais Bial, assure avoir parfaitement tout géré. Mais la réalité est moins flatteuse. Le centre de recherche rennais aurait-il dû réagir dès les premiers symptômes ressentis le dimanche matin par Guillaume Molinet, le volontaire sain qui décédera une semaine plus tard, et l'hospitaliser plus rapidement ?
Le dimanche 10 janvier à 20 h 30, un courrier de Biotrial est adressé au médecin des urgences du CHU de Rennes qui reçoit Guillaume Molinet. Selon cette lettre, consultée par Le Figaro, l'état de santé du volontaire est déjà très préoccupant. Le patient «présente depuis ce matin des troubles de la vue (flou visuel) qui se sont majorés au cours de la journée (diplopie avec apparition d'une dysarthrie importante - difficulté et lenteur à l'articulation) et des céphalées importantes, frontales et postérieures, pour lesquelles il a reçu 1 gramme de paracétamol à 20 heures ce jour». L'auteur du courrier précise: «L'examen neurologique révèle un état ébrieux majeur (état confus, NDLR), sans déficit sensitivo-moteur objectivé jusqu'alors.»
Des symptômes qui «devaient alerter»
Autant de symptômes qui chez n'importe qui «devaient alerter, explique un médecin au Figaro. Alors encore plus chez un volontaire inscrit dans un essai clinique portant sur une drogue à visée cérébrale !» Un autre expert observe que l'auteur du courrier a bien noté un «syndrome confusionnel avec céphalées faisant penser à un problème généralisé et donc lié à l'administration du médicament». Un neurologue ajoute: «Dans un cas comme celui-là, il s'agit d'une urgence à explorer au maximum via des imageries cérébrales appropriées, comme une IRM et un examen neurologique approfondi.» Le dimanche soir, le patient ne passera qu'un scanner à 22 heures.
Des troubles mineurs, pour Biotrial
Pourtant, Biotrial a toujours parlé de troubles mineurs. Ainsi, ces déclarations de son directeur général, François Peaucelle, dans une interview au Figaro publiée le 30 janvier dernier. «Le volontaire hospitalisé le dimanche 10 janvier présentait ce jour-là des symptômes qui n'alarment pas dans la vie quotidienne, notamment des maux de tête. Mais nous l'avons envoyé aux urgences vers 20 heures pour des explorations complémentaires, à titre de précaution.»
Dans son rapport d'étape, l'Inspection générale des affaires sociales établissait une chronologie des événements. Il apparaît que les premiers symptômes surviennent dimanche vers 9 heures du matin, puis d'autres, «qui auraient pu rétrospectivement alerter vers le système nerveux central», deux heures plus tard. Entre 15 et 16 heures, Guillaume Molinet est vu par un médecin de Biotrial «déambulant» sans pour autant être examiné. Ce n'est qu'à 18 h 30 que d'autres volontaires alertent sur son état.
Les médecins de Biotrial décident alors de son transfert au CHU de Rennes et rédigent la note précédemment citée. Il est 20 h 30 ce 10 janvier. Le lendemain matin, Biotrial poursuit l'essai en administrant la molécule aux cinq autres volontaires. Il est 8 heures, soit une heure avant que Guillaume Molinet ne passe une IRM.
Le Figaro Santé
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