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La schizophrénie est une maladie d'amour

Publié le 19 sept. 2017 • Par Léa Blaszczynski

Voici le témoignage de Shizo guéri, 72 ans, membre de Carenity et atteint de schizophrénie. A travers son histoire et ses expériences, découvrez comment il a su apaiser ses troubles psychiatriques pour vivre heureux. Auteur du livre "Ma schizophrénie a été une maladie d'amour", il y reproduit les différents courriers qu'il a adressés à ses psychiatres de 1962 à 2018.

La schizophrénie est une maladie d'amour

Bonjour, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je suis né en 1945, de parents de la classe ouvrière. J’ai exercé la profession d'employé de banque de 1965 à 1997. Je suis marié (sans enfant) depuis 1973. Ma belle-mère - qui a souffert de paranoïa et ensuite de la maladie d’Alzheimer - a vécu trente ans sous notre toit.
J’ai eu six ans et demi d’arrêts de travail et seize hospitalisations pour raisons de santé psychiatrique. Les deux premières pour schizophrénie en 1966-1967 et la dernière pour dysthymie en 2000. Ma femme et moi vivons actuellement une retraite bienheureuse sur la Riviera française.

schizophrénie

Depuis combien de temps souffrez-vous de schizophrénie ?

Je pense souffrir de schizophrénie depuis ma naissance mais les troubles ne se sont révélés qu’à l’âge de 21 ans en 1966. Une collègue de bureau et mon neuropsychiatre psychothérapeute - qui me suivait depuis 1962 pour une névrose obsessionnelle grave à forme essentiellement sexuelle - sont alors intervenus en position symbolique dans mes problèmes sentimentaux. Ma collègue me rappelant ma mère, mon médecin me rappelant mon père ; lesquels m’avaient psychologiquement manqué en quelque chose. Ce qui a ainsi déclenché mes deux crises psychotiques successives. 

Comment avez-vous été diagnostiqué ? Vous souvenez-vous du jour de votre diagnostic ?

Le diagnostic ne m’a pas été révélé verbalement entre quatre yeux par un psy. Je l’ai appris avec la courte mention : “Diagnostic à la sortie en langage international : schizophrénie” indiquée par le psychiatre de l’hôpital sur mon bulletin de sortie. Par la suite des experts auprès les tribunaux (1968 et 1973), un psychiatre psychanalyste (1995) et une psychiatre psychanalyste (2013) m’ont confirmé que ce diagnostic leur paraissait être le reflet de la vérité.

De quelle façon la schizophrénie a-t-elle altéré votre qualité de vie ?

J’ai été surdosé de médicaments psychotropes (tranquillisants, somnifères, neuroleptiques, etc.). Tant et si bien que j’étais suicidaire en permanence. Cela se traduisait par des crises de narcolepsie pendant lesquelles il fallait que j’aille dormir une matinée entière à l’infirmerie de mon travail. Mais compte tenu de la gravité de mes insomnies, les psys ne pouvaient, à l'époque, pas faire autrement que me surdoser pour que je puisse réussir à dormir malgré tout...
Mon employeur ne m’a gardé pendant trente ans qu'à cause de la convention collective. En effet, comme j’ai été titularisé avant ma schizophrénie en juin 1966 après un an de stage, en cas de licenciement pour raison de santé, mon employeur devait reconstituer ma retraite privée et me verser une pension d’invalidité égale à la moitié du montant de mon salaire. Faute de pouvoir me régler l'intégralité de ces sommes, il a préféré continuer à reporter mon licenciement.

La maladie a-t-elle eu un impact sur vos relations avec vos proches ?

Ce sont mes collègues de travail qui ont signalé à mon chef de bureau mes troubles psychiatriques lors de ma première crise. A l'époque, je leur racontais que la nuit j’avais vu la Tour Eiffel changer de place ou que les communistes avaient pris le pouvoir. Mon chef m'a alors envoyé au service médico-social. Et c’est ainsi que l’assistante sociale, le médecin de l’administration et le médecin du travail - après avoir pris contact avec mon neuropsychiatre psychothérapeute de l’époque - ont décidé de mon hospitalisation.
A mon retour de maison de santé psychiatrique dite “maison de repos” (après ma deuxième hospitalisation d’environ deux mois et demi), j’ai été affecté dans un autre service. Là, j’ai vite découvert que mes collègues étaient méchants à mon égard. A mon avis, ils étaient jaloux aussi de mes arrêts de travail et de mes aménagements d’horaire (je commençais une heure plus tard et je partais une heure plus tôt).
Ce sont mes parents qui m’ont hospitalisé lors de ma deuxième crise. Je leur racontais que j’étais Lénine, que mon père était Staline, que j’étais victime du culte de la personnalité, que je communiquais par télépathie avec une jeune collègue de bureau dont j’étais amoureux...  Ils ont toujours été très choqués par mes délires, hallucinations et troubles de l’humeur. Mon père a toujours eu honte de ma maladie, et ma mère s’est toujours cru responsable voire coupable de celle-ci.

Quel professionnel de santé vous suit ? Et quel est la qualité de ce suivi ?

Actuellement, je suis suivi par une psychiatre psychothérapeute spécialisée dans les troubles psychiatriques des enfants. C’est moi qui ai fait ce choix en accord avec mon médecin traitant qui, lui, me prescrit les médicaments. Je considère que "la schizophrénie est une maladie d’amour mal vécu dans la petite enfance (forclusion du Sein-de-la-Mère et forclusion du Nom-du-Père) que seul, à l’âge adulte, un amour véritable grâce à une compagne ou à un compagnon peut éventuellement guérir". Je suis très heureux d’avoir trouvé cette explication de la schizophrénie.

Quel est votre avis sur votre traitement ? S’il y en a, quels sont les effets secondaires ?

C’est moi qui fais mon traitement avec l’accord de mon généraliste. Actuellement, je suis sous aripiprazole à la dose 10 mg, car ça ne me gêne pas de prendre un médicament qui n’a aucun effet indésirable et même des effets désirables. D'ordinaire, on le prescrit aux étudiants en médecine pour les stimuler pendant les examens et aux personnes âgées pour protéger leur cerveau. De toute façon, on ne peut pas prouver la guérison d’une schizophrénie car il n’existe aucun examen médical  ou test psychologique permettant de constater que l’individu n’est pas ou plus porteur de sa structure mentale psychotique. Mais mon vécu et mon ressenti me font dire que je suis effectivement guéri.  

Avez-vous un message à transmettre aux personnes dans la même situation que vous ?

Les psys soignent la schizophrénie mais ne la guérissent pas. Tout simplement parce que les médicaments et la compassion des médecins ne suffisent pas ! Cette maladie d’amour mal vécu dans la petite enfance évolue en crises psychotiques après un choc psychologique à l’âge adulte. Pour guérir de cette maladie gravissime, ça dépend sur qui vous allez tomber dans la vie ! Si je n’avais pas rencontré Chantal en 1973, jamais je n’aurais pu guérir de ma psychose ! A mon avis, elle a réparé, par son amour véritable, quelque chose qui avait été cassé lors du complexe d’Œdipe par mes deux parents. Ceux-ci ne sont pas coupables car ils m’ont toujours aimé et ont fait toujours tout leur possible pour moi. Mais il n’y aura jamais ni société, ni éducation parfaites et rien que pour ça, la schizophrénie comme d’autres pathologies psychiatriques existeront toujours ! Que faire contre cela ? Ne pas désespérer ! Nul ne peut prévoir l’avenir...

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Auteur : Léa Blaszczynski, Rédactrice santé, experte en communication

Chez Carenity depuis 2013, la rédaction d’articles santé n’a plus de secrets pour Léa. Elle a une appétence particulière pour les domaines de la psychologie, de la nutrition et de l’activité physique.

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