Bipolarité et l'ennui

Bonjour à les participants(es) à ce forum très intéressant à lire au fil des témoignages interactifs. 

A mon tour d'y rajouter ma pierre et pour moi, elle est par moment lourde à porter. A savoir, je confirme l'ennui, le vide, le désintérêt du monde extérieur et des autres dans les pires moments puis un regain d'intérêt mais toujours limité dans le temps et en intensité. 

Voilà un tour d'horizon rapide de ce qu'est devenue ma vie de bipolaire stabilisé Depuis plusieurs années maintenant à la retraite après la mise en invalidité.

A cela je dois ajouter des victoires : plus de traitements lourds, plus d'hospitalisations et seulement un suivi mensuel en psychiatrie de ville.

Evidemnent, j'ai à mes heures perdues de la nostalgie et même de l'incompréhension comme si je ne me reconnaissais pas dans ce que j'ai été : est-ce bien moi dans mes souvenirs ou sur les photos qui me remémorent des moments de bonheurs passés. 

Mon honnêteté intellectuel doit aussi me rappeler mes angoisses et mes passages à l'acte. Alors, au final je pense être sorti gagnant et que la prise en charge thérapeutique est globalement positive et que j'ai encore et beaucoup de chance d'être là pour écrire cela. 

Par conséquent, je m'accomode plutôt bien de cet état de lassitude à la vie qui a le privilège de me sauvegarder de mes démons. En soi, c´est une grande victoire.

Je souhaite à toutes les personnes entraînées dans cette spirale de la bipolarité de trouver une zone d'équilibre pour atteindre un bien-être dans la durée comme c'est le cas pour moi.

Bien fraternellement.

Sylvain

L'ennui, compagnon fade et détestable des maniaco dépressifs en phase de stabilisation ! Excusez moi j'abhorre le terme de bi-polaire , qui ne rend pas compte des états réels que nous traversons . Le monde est bi-polaire , l'électricité est bi-polaire , le monde politique est bi-polaire , .Tout et tout le monde est bi-polaire !

L'ennui serait le meilleur compagnon de bon conseil que nous devrions avoir , grâce à des petits poisons que nous déglutissons matin et soir afin de stabiliser notre humeur .Petits poisons qui nous lobotomisent , qui assèchent toute créativité et intérêt , grosses pilules pour nous permettent de nous insérer dans un monde qui n'est pas le nôtre , qui nous fait avaler les codes sociaux qui nous enquiquinent , qui nous rendent fréquentables et sages : bon parent , bon epoux(se) bon petit travailleur , amis reposants, bon fils et bonne fille ...Merci docteur , merci petit chimiste  !

Je ne crois pas que nous ayons malheureusement le choix .Notre comportement hypo n'est pas toujours à se tordre de rire et nous entraine tout droit dans la glaise de la dépression sévère , nous paralysant de sa poisse, nous ligotant et nous asphyxiant .

La mort n'est jamais loin , l'HP toujours en perspective .

Alors oui il y a toutes sortes de "thérapies d'occupation" propres à chacun , mais sommes nous dupes ?Sommes nous satisfaits pour autant ? Pas de passions , pas de petits ou gros délires qui décuplent notre force vitale au risque de mettre notre vie en danger c'est vrai .

Dans ma longue vie de maniaco-dépressive , grandes furent les tentations de mettre ces psychoTropiques dans un coffre bien fermé dont j'aurais avalé la clé . Fréquentes furent les tentatives d'arrêt . Systématiques furent les reprises des traitements parce que trop malheureuse, parce que trop you-you , parce que l'oubli de dormir de manger de se poser .Parce que les TS sans grand succès et parce que l'enfermement , les règles strictes et insupportables  de l'hôpital ! Nous qui n'aspirons qu'à voler librement là où bon nous semble , nous sommes condamnés à la camisole chimique , à la routine , à l'ennui .Cet ennui et cette routine que nous détestons si viscéralement .

Si j'avais une solution autre que les thymo , si je savais comment m'apaiser quand cela devient impératif , si je savais éviter dépression et maniaquerie , je ne serais pas atteinte d'une maladie qu'on appelle aujourd'hui les troubles bi-polaires et ce serait avec une joie sereine que je partagerais avec vous mes trucs et mes machins , c'est avec une frénésie heureuse que je vous donnerais les recettes de mes petites magies et autres sorcelleries .Oh que oui !

On nous dit qu'il faut accepter ce handicap , qu'il faut nous adapter .

Je ne sais pas si ce que je te dis est particulièrement réconfortant , j'en doute , mais non tu n'es pas seule , nous sommes même une association d'individus tous différents les uns des autres , multiples mais nous vivons tous les conséquences des traitements qui nous maintiennent la tête hors de l'eau .

Et quand même nous sommes des êtres attachants , différents , pleins de ressources .Nous sommes uniques ! Ce n'est pas facile à vivre ni pour nos proches ni pour nous mêmes , mais qui a dit que la vie était facile et douce ?

Nous ne sommes pas qu'une maladie !

Bonjour à tous,

Je suis reconnue bipolaire depuis 14 ans et j'ai, semble-t-il trouver un équilibre dans ma vie actuelle. Je prends des médicaments, certes, mais je les accepte comme une protection contre mes excès.

Ayant été mise à la retraite pour invalidité, alors que je n'ai que(!) 46 ans, je travaille en tant que bénévole dans 2 associations et cela occupe bien mes journées...

Bref, ma vie est agréable et je savoure enfin les petites joies de la vie!

Amicalement.

merci mosquito43 pour ce témoignage. exemplaire et sensé !! oui un malade diagnostiqué bipolaire doit suivre son traitement...comme un diabétique...ou autre maladie chronique...merci à vous.

alyzée

suis  stabilisée :je ne m'ennuie pas à condition  d'être tjrs occupée je fais du sport et j'ai écrit un livre, "Jesuis bipolaire, j'ai vécu l'enfer" qui sortira ce mois normallement

Cordialement

A JM Bateau,

Au sujet du livre à paraître " Je suis bipolaire, j'ai vécu l'enfer ", quel est l'éditeur ? Merci pour la réponse car cela m'intéresse de lire un témoignage vécu au coeur de la souffrance psychique de cette maladie étant moi-même diagnostiqué bipolaire par l'une des psychiatres qui m'ont pris en charge depuis des années. Bien amicalement. Sylvain

Bonjour à tous 

Comme je vous comprends tous, moi aussi je m'ennuie énormément. Depuis 3 mois je suis sous xeroquel et ma vie a totalement changée. Je n'ai plus  gout a rien et surtout je n'ai plus aucun sentiment, même pour mon mari et mes enfants si bien que je pense entame une procédure de divorce. Je n'ai plus gout a la vie j'ai l'impression d'être un robot. Je ressens plus aucune émotion,  je ne sais pas quoi faire si quelqu'un a une idée elle sera la bienvenue. 

Merci a tous

Bonjour Sohan,

Ce que tu décris de ta nouvelle perception ambiante correspond grosso modo à mes  ressentis. Comme tu demandes de l'aide du type quoi faire pour se sortir de cet état, je vais te dire pour moi ce que je fais pour atténuer ce spleen. Effectivement, la mélancolie n'est jamais éloignée de mes états d'âme. Mais je résiste et cela me demande de l'énergie et des phases de repos intermédiaires. Le tout étant de ne pas allé jusqu'à l'épuisement. Donc en résumé, pas d'hyperactivité mais pas de phobie sociale et d'immobilisme par ailleurs. Pas facile de trouver un juste dosage pour moi. Pour me motiver, je reviens vers mes fondamentaux en terme de sujets d'intérêts de toujours, y compris en plongeant dans mes souvenirs de la vie d'avant. Nous avons tous une vie antérieure à la maladie. Nous ne venons pas de nulle part. Alors petit à petit, je me construis un monde personnel où j'essaie de me faire du bien en jouant un rôle de thérapeute avec moi-même. C'est la fonction cicatrisante du "care". C'est dans cette phase de reconstruction qu'il y a un risque de rejet de l'autre (mari, enfants etc.) s'il y a des incompréhensions ou des comportements non solidaires. Car c'est pas facile d'être malade puis de se prendre dire en charge avec l'aide des professionnels de santé alors si en plus les proches ne comprennent pas. On n'est pas loin de la rupture avec eux. Dans ce cas, le mieux serait d'entamer une thérapie de couple ou familiale pour désamorcer les conflits. Selon l'adage, l'herbe n'est pas plus verte dans le pré d'à côté. Avant de prendre une décision définitive, mieux vaut prendre des conseils avisés avant. C'est cette démarche pleine de sagesse qui me semble la plus opportune. Bon courage à toi. Bien amicalement. Sylvain

@sylefi et autres membres

C'est sûr, @sohan je t'ai répondu en privé mais pour la majorité des maladies il vaut mieux commencer par s'occuper de soit, de se reconstruire avant de précipiter les choses et pouvoir prendre ensuite les problèmes au fur et à mesure, les uns après les autres, pour avoir le recule etles idées claires pour prendre les bonnes décisions et ne pas réagir sur un coup de tête et dans l'impulsivité même si on en à marre parfois.

Bonne journée

Sohan

tu sais que notre maladie c'est être sur une balançoire , hop je vole les cheveux dans la figure et des larmes de rire , un peu de vertige aussi , hop je redescend , et c'est à la force de nos jambes et de  nos petits bras musclés que nous pouvons espérer s'envoler de nouveau .

Parfois on tombe par terre , les genoux et les mains écorchées , on pleure , on a mal , et on ne peux plus ni marcher ni courir .

Et parfois , le derrière posé sur la planche , la balançoire reste parfaitement immobile .Impossible de la faire bouger , pas envie , pas drôle .On est statufié , les mains accrochées à la corde .

La balançoire est stabilisée .

Mais que c'est morne et triste , on n'a même pas envie de pleurer ; TOUT nous indiffère

Ne prend pas de décisions définitives qui te donneront l'illusion qu'enfin il se passe QUELQUE chose .Qu'enfin ta vie ne sera plus ce grand rien .

Mais toi tu seras toujours la même, toujours dévastée de chagrin abyssale , toujours dansant comme un derviche tourneur qui tourne tourne tourne jusqu'à la chûte , toujours dévorée par la rouille de l'ennui .Et parfois connaissant de courts ou très longs moments de pause , voire de paix .

iL est tout à fait possible que ta vie auprès de ton mari ne te convienne plus , c'est très banal .Mais ne prends pas ce genre de décision lourde et définitive avant que tu n'ailles mieux . Ne le fais que si c'est ton mari qui n'est plus le compagnon de ta vie , ne le fais qu'en conscience apaisée . 

Ce cycle de notre pathologie nous souffle, mauvais conseiller , qu'il faut tout bazarder de sa vie du moment , mari , enfants , amis ,pays , travail ( quand on a la chance d'en avoir encore un ) . Et que tout ira mieux !

Il est impossible de te conseiller , de te donner des solutions tu le sais bien , si ce n'est de réflêchir : "c'est moi ou c'est l'autre ? "

"Ma vie s'en trouvera-t-elle changée pour autant , je me sentirai mieux ? "

" Reste-t-il encore de l'amour , de la tendresse, des choses à partager ?"

Toi seule détiens la réponse tu le sais , et cette idée augmente d'autant plus ton désarroi .

Si tu peux en parler à quelqu'un de proche et de confiance , parle !

Si tu peux en parler avec ton mari et voir ce que vous devriez changer dans votre mode de vie , parle .

Si tu as besoin de changer d'horizon , et si tu as la possibilité de t'évader de ton quotidien si ennuyeux qui te pèse tant alors prends la route et trouve toi un endroit pour toi , pour réfléchir et te poser un peu . Si tu le peux fais le .

La routine de ma vie avec mon amoureux , ses rites inamovibles , me font souvent songer à tout bazarder et qui vivra verra !

Mais je sais aussi que forcément notre pathologie , nos traitements ne nous permettent pas toujours d'avoir une vie de couple très harmonieuse ni très satisfaisante sur beaucoup de plans .Je sais aussi que nous sommes des compagnes (ons) complexes, difficiles à vivre, et que la vie que nous leur faisons n'est pas des plus faciles ni des plus fun .

Pour ce qui concerne mon compagnon , je sais sa patience, je sais son angoisse, je sais ses frustrations et je sais son sentiment d'impuissance à m'aider .Mais parce qu'il est celui qu'il est , que même s'il est parfois maladroit , routinier comme la mort , il sait m'entendre même s'il aimerait être sourd parfois , je ne sais s'il comprend mais je sais qu'il m'accepte telle que je suis même si parfois il doit avoir envie de claquer la porte .Je sais qu'il y a de l'amour .Et je sais qu'après chaque disparition , fugue que je fais , je sais qu'il me manque .

Quoi faire pour retrouver goût à la vie , intensité des émotions et ne plus être cette statue de pierre que nous sommes ? Attendre attendre qu'un autre cycle nous débarrasse de cette peau d'âne pour révéler la princesse scintillante que nous cachons sous cette pelure .

Et peut être voir avec le psy si ce médicament te convient ou non .Tu ne le prends que depuis trois mois et peut-être qu'une autre molécule ou un ajustement de ton traitement te donneraient un peu plus de goût à la vie .

Tu dois parler , même si c'est le silence qui se fait en toi .

Toujours à ton écoute .Et comme te l'a écrit Clash , un pas devant l'autre , un marche après l'autre . Carpe Diem