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« J’ai enfin un nom à mes douleurs » : le combat de Léa contre le syndrome d’Ehlers-Danlos

Publié le 7 août 2025 • Par Candice Salomé

À seulement 23 ans, Léa vit avec un syndrome rare et peu connu, le syndrome d’Ehlers-Danlos, qui affecte son corps et bouleverse son quotidien. Après des années d’errance médicale, elle raconte avec sincérité comment ce diagnostic a éclairé ses douleurs multiples et invisibles, et comment elle apprend à vivre avec cette maladie complexe. Son témoignage éclaire aussi le combat des patients souvent incompris face à une pathologie rare. 

Découvrez son histoire touchante et ses précieux conseils pour celles et ceux qui vivent un parcours similaire.  

« J’ai enfin un nom à mes douleurs » : le combat de Léa contre le syndrome d’Ehlers-Danlos

Bonjour Léa, vous avez accepté de témoigner pour Carenity et nous vous en remercions.  

Tout d’abord, pourriez-vous commencer par vous présenter ? 

Je m’appelle Léa, j’ai 23 ans. Depuis le divorce de mes parents, je vis exclusivement avec ma mère et mon frère. Mon petit frère a 20 ans et a tout ce qu’il faut dans la vie. C’est mon tout, il est ma vie. Mon père habite dans le Nord, là d’où nous sommes originaires, et il a été dans notre ville à 19 ans. Toute ma famille est dans le Nord ; nous sommes trois à être dans le Sud. J’aime énormément lire, mais dans les moments où le moral est bas, impossible de lire. 

Je sensibilise au trouble borderline sur mon compte Insta, et je me développe sur d’autres troubles psychiatriques et de maladies physiques. J’aime la natation ; la sensation de l’eau dans le corps, c’est une sensation extrêmement agréable pour moi, qui ai toujours été un poisson dans l’eau

Je ne travaille pas, j’ai trop de pathologies qui m’empêchent de faire des études ou de travailler dans un premier temps. Puis, je n’ai pas encore trouvé ma voie dans la vie professionnelle. 

Avant que le diagnostic du syndrome d’Ehlers-Danlos ne soit posé, comment décririez-vous votre quotidien avec vos douleurs et vos différents symptômes ? 

Avant le diagnostic du syndrome d’Ehlers-Danlos, on ajoutait des pathologies les unes après les autres. Ça a commencé avec le POTS (syndrome de tachycardie orthostatique posturale) en décembre 2023, après plus de 5 ans d’errance médicale. Puis, après, on s’apercevait qu’une maladie d’hiver empirait au lieu de guérir, et se transformait en pneumonie, par exemple. Que j’étais résistante aux antibiotiques, puis aux antidouleurs. 

J’avais des douleurs dans les jambes inexpliquées, des migraines qui me gâchaient la vie, des douleurs dans les lombaires, des douleurs pelviennes même en dehors de mes règles. Là, on a posé le diagnostic de l’endométriose ainsi que du syndrome des ovaires polykystiques (SOPK). Puis est arrivé le diabète, le 25 mai 2024. J’ai passé mon été à l’hôpital, et un an après, on est toujours au même point : un diabète atypique non stabilisé

Puis, il aura fallu un accident de voiture pour me diagnostiquer des entorses un peu partout, et des luxations. Mais rien d’étonnant pour moi : j’ai toujours eu énormément d’entorses et de luxations depuis toute petite. 

Ma vie était – et est toujours – rythmée par les rendez-vous médicaux, les hospitalisations, les examens, avant même d’avoir les diagnostics. Des heures passées dans la salle d’attente. 

J’ai toujours eu le discours du « c’est dans votre tête », « c’est le stress », « arrêtez de faire semblant ». J’ai consulté je ne sais combien de fois, j’ai arrêté de compter les nuits blanches et les pleurs à cause des douleurs. Mais « tout allait bien ». 

À toutes les personnes chez qui j’ai consulté, surtout mon médecin traitant : je vous l’avais bien dit. 

Vous avez été orientée vers un algologue à l’origine pour des douleurs liées à l’endométriose. Que s’est-il passé pendant ce rendez-vous pour que tout bascule ? 

À force de consulter, mon gynécologue m’a envoyée vers un algologue qui a fait le diagnostic en 1 heure. Ça a été incroyable, parce qu’enfin on me posait les bonnes questions. Enfin, quelqu’un se souciait vraiment de moi, sans compter le temps qu’on passait à discuter. Une personne qui ne se limitait pas seulement à sa spécialité. 

Il m’a découvert des névralgies, des sciatiques que je ne sentais même pas tellement j’avais de douleurs. 

Face à tous mes diagnostics posés en un peu plus d’un an, avec ma famille, on se disait que ce n’était pas une coïncidence, toutes ces maladies, qu’il y avait un lien. Et il y en avait bien un : le SED

Mon algologue me l’a dit calmement. C’était d’une telle évidence qu’il ne comprenait pas pourquoi cela n’avait pas été cité plus tôt.  

Comment avez-vous réagi lorsqu’on vous a parlé, pour la première fois, du syndrome d’Ehlers-Danlos ? Était-ce une découverte ou connaissiez-vous déjà un peu cette maladie ? 

Mon algologue m’a dit clairement : « Vous avez le SED ». Je n’ai pas répondu tout de suite, il y a eu un gros blanc avant que je dise : « Vous croyez ? », pour enlever le malaise. Il m’a expliqué en quoi il pensait tout ça, et qu’il pensait surtout à un SED hypermobile, suite à ma grande hyperlaxicité

Pour prouver une hyperlaxité, il existe une échelle de Beighton, qui va de 0 à 9. J’ai un score de 8/9

Je suis partie du rendez-vous soulagée d’avoir enfin quelque chose qui reliait tous mes symptômes, et de savoir que j’allais être suivie pour ça. Mais je ne savais toujours pas ce qu’était le SED. J’ai donc cherché sur Internet, dans la voiture, et j’ai vu : « Syndrome d’Ehlers-Danlos ». Et là, j’avais un vrai nom. 

Pour comprendre et expliquer le syndrome à l’entourage, ça a été compliqué, car le syndrome est complexe, et j’ai eu du mal à le comprendre moi-même. Malheureusement, on ne peut rien faire pour ce syndrome. Il est rare, génétique, et infantile. On peut seulement soulager les symptômes, comme dans les soins palliatifs.  

Quels signes ou éléments ont conduit votre médecin à suspecter cette maladie rare ? Avez-vous passé des tests spécifiques ?  

Il a juste fallu discuter, et un examen pas très complexe, pour voir l’hyperlaxité et les points douloureux. Le simple dialogue a suffi à poser le diagnostic. 

Malheureusement, ce syndrome est inconnu au bataillon : mon médecin traitant ne connaît pas, mes pharmaciens ne connaissent pas, mes psychologues, mon psychiatre, mes infirmières ne connaissent pas non plus. Et ça engendre un grand sentiment de solitude… sauf que ce n’est pas un sentiment : on est vraiment seule face aux symptômes innombrables

Le SED touche le collagène, qui se trouve sur tous les organes du corps. Donc, c’est une maladie et une prise en charge pluridisciplinaire. 

Les signes qui ont orienté mon algologue sont les suivants : entorses chevilles, poignets, genoux, cervicales ; hyperlaxité genoux, coudes, doigts, pouce ; terrain d'endométriose ; troubles de l'articulation temporo-mandibulaire avec blocage de la mâchoire ; myopie ; troubles de la thermorégulation ; frilosité ; ecchymoses spontanées ; troubles de la proprioception ; RGO ; ballonnements ; colopathie irritable ; élasticité de la peau ; cicatrisation difficile ; gingivorragie au brossage ; épistaxis ; hyperlaxité avec score de Beighton à 8/9 ; trouble pondéral ; vergetures ; subluxation de l'épaule gauche. 

Recevoir enfin un diagnostic après des mois, voire des années d’errance médicale, a-t-il été un soulagement pour vous ? 

Un énorme soulagement : c’était fini, le flou. Je savais d’où venaient tous mes symptômes

Mais bon… une petite douche froide, quand on comprend que rien ne pourra faire disparaître le syndrome, et que justement, il grandira avec le temps

Vous aviez déjà plusieurs pathologies diagnostiquées avant : est-ce que ce nouveau diagnostic vous a permis de faire des liens entre tous vos symptômes ? 

Tout s’est emboîté comme un puzzle, à ce moment-là. Tout était relié au SED, comme une carte mentale avec le SED au centre et des branches qui définissaient chaque symptôme. Et croyez-moi, il y en a plein… beaucoup trop, même. 

Savoir que la plupart des médecins ne savent pas ce que c’est, et ne peuvent pas aider, nous oblige à nous déplacer dans les grandes villes pour être reconnue, comprise et prise en charge

Les seules pathologies qui ne sont pas en lien avec le SED sont le diabète et les troubles psychiatriques

Avez-vous parfois eu le sentiment de ne pas être prise au sérieux par certains professionnels de santé, notamment à cause de la multiplicité de vos symptômes ? 

J’ai toujours eu l’impression qu’on ne me prenait pas au sérieux. Pour diagnostiquer n’importe quelle pathologie, il fallait au moins cinq ans avant de poser le diagnostic. J’en ai vu, des spécialistes (Narbonne, Perpignan, Toulouse, Montpellier)… et ça continue encore.  

Le syndrome d’Ehlers-Danlos étant peu connu, est-ce que cela complique votre prise en charge aujourd’hui ? 

Le fait que le SED soit peu connu complique énormément la prise en charge, surtout qu’il est complexe et qu’on n’imagine pas tout le nécessaire médical que cela implique. Les traitements, la plupart ne sont pas renouvelables : cela veut donc dire que tous les mois, je dois refaire faire mon ordonnance pour les antidouleurs… malgré leur inefficacité

Ma mère et mon frère, qui vivent avec moi, comprennent plus que le reste de ma famille, qui est un peu plus loin. Je suis « trop jeune », « t’inventes, tu peux pas être aussi malade », « tu as l’air en pleine forme »… parce que c’est invisible, tout simplement. Et pour les grands-parents, une jeune fille de 23 ans qui ne sort pas, qui reste au lit, ou qui ne fait pas de sport, c’est incompréhensible. 

J’ai eu des mots de ma grand-mère, où je disais que j’étais fatiguée, avec mes attelles, et elle me répondait : « Bah viens, on va marcher ! » Même ce sport m’est interdit… donc la compréhension, ce n’est pas gagné. 

Comment parvenez-vous à concilier cette maladie rare avec d’autres aspects de votre santé, comme votre diabète ou vos troubles psychiques ? 

Pour être honnête, je n’arrive pas à concilier toutes ces pathologies. Je suis loin de la warrior qui arrive à tout faire et à être bien tous les jours. Chaque jour, un ou plusieurs symptômes me clouent au lit, m’empêchent de me déplacer. Je fais au moins un malaise par jour, peu importe la cause. 

Et le SED, avec ses contraintes, rend mon côté borderline beaucoup plus irritable et impulsif, dépressif, triste, hypersensible, etc. Et je pourrais continuer comme ça pendant longtemps… La douleur fait augmenter la glycémie, donc ça ne m’aide pas non plus… 

Avec le recul, que diriez-vous à une jeune femme qui se reconnaîtrait dans vos douleurs ou votre parcours, mais qui n’a pas encore reçu de diagnostic ? 

Si tu as des douleurs dans les jambes après une grande journée, et qu’on t’a répondu que c’était parce que tu grandissais ; si tu sais faire des trucs qui impressionnent tes camarades avec tes articulations, tu peux en rire, mais ça cache quelque chose. 

Si tu te cognes souvent et que tu as des bleus inexpliqués, ce n’est peut-être pas de la maladresse. 

Donc, n’hésite pas à évoquer le syndrome d’Ehlers-Danlos à ton médecin le plus rapidement possible, pour être cru plus vite et mieux pris en charge dans des centres des maladies rares. 

Un dernier mot ? 

Pour les peu comme moi, courage : un jour après l’autre, ou plutôt une heure après l’autre. 

« Vivre avec un corps douloureux, doublé d’un corps silencieux », c’est ce qu’on vit tous les jours. 

 Un grand merci à Léa pour son témoignage !

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avatar Candice Salomé

Auteur : Candice Salomé, Rédactrice Santé

Créatrice de contenus chez Carenity, Candice est spécialisée dans la rédaction d’articles santé. Elle a une appétence particulière pour les domaines de la psychologie, du bien-être et du sport.

Candice est... >> En savoir plus

2 commentaires


Nathou Nathy
le 07/08/2025

Bonjour Léa,oui,un parcours du combattant,je pense que tu as vu le même Algologue que ma Fille,25 ans . Pour plus d'infos ,je te propose de rejoindre SED in France,la seule association qui se bat et qui donne beaucoup d'infos 🙂 Bon courage


phildu
le 13/08/2025

Léa, à 23 ans, tu fais preuve d'une force et d'une résilience incroyables. Le combat contre le syndrome d'Ehlers-Danlos n'est pas une course, mais un marathon, et chaque jour, tu enchaînes les kilomètres avec courage et dignité. Sache que tu n'es pas seule. Ton courage est une source d'inspiration pour tous ceux qui te connaissent. Continue de te battre avec la même énergie, Sur Carenity nous sommes à tes côtés pour t'encourager.

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