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Entre dissociation et résilience : le témoignage de Kieran sur le trouble dissociatif de l'identité (TDI)

Publié le 21 mai 2025 • Par Candice Salomé

Le trouble dissociatif de l'identité (TDI) est encore trop souvent mal compris, et ceux qui en souffrent sont confrontés à des préjugés lourds. Kieran (dit @kieran_system sur Instagram), un jeune entrepreneur passionné par le cinéma d'animation et l'ésotérisme, partage son expérience de vie avec ce trouble complexe. Entre dissociation, hypervigilance, et travail quotidien pour comprendre ses alters, il nous raconte son cheminement personnel et ses aspirations. Découvrez son témoignage sincère et inspirant pour mieux comprendre les défis d'une réalité peu connue. 

Entre dissociation et résilience : le témoignage de Kieran sur le trouble dissociatif de l'identité (TDI)

Bonjour Kieran, vous avez accepté de témoigner pour Carenity et nous vous en remercions. 

Tout d’abord, pourriez-vous vous présenter ? 

À cause de traumatismes subis durant l’enfance, mon cerveau a mis en place un mécanisme de protection : la dissociation. Cela a créé des altérations de conscience que l’on appelle communément alters. Durant mon enfance, d’ailleurs, il y avait également des signes du trouble du spectre autistique : un retard de langage, des troubles dys, des difficultés sociales. J’ai d’abord été diagnostiqué d’un TDI, puis d’autisme. Passionné par le théâtre que j’ai commencé à 8 ans, je décide d’aller en internat pour passer un bac avec cette option. Les dix années de harcèlement ont eu des conséquences à vie. J’ai été déscolarisé le dernier trimestre du bac. Une fois obtenu, je déménage à Paris où je continue le théâtre. Ma santé mentale commence à se détériorer. J’entame, à 21 ans, une transition de genre. Quelques années plus tard, je prends conscience du trouble dissociatif, ainsi que de l’autisme, à deux ans d’écart maximum

Cette année est dédiée à ma santé mentale, pour pouvoir trouver une stabilité et avancer sereinement dans mes projets. Mes intérêts spécifiques sont l’univers de Disney, les animés ainsi que la psychologie. 

Depuis un an, je prépare mon entreprise, liant mes deux intérêts spécifiques : le cinéma d’animation et l’ésotérisme. En plus de proposer des prints imprimés à mon domicile, je vais également publier un roman, Kieran_Système, pour vulgariser la santé mentale, ainsi que proposer des articles faits main comme des encens, spell jars, et autres. J’entame bientôt une formation pour connaître les bases de l’entrepreneuriat. J’espère également pouvoir reprendre mes études dans un cursus de psychologie, ainsi que me former pour devenir « patient expert ».

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Avec l'aimable autorisation de Kieran

Pouvez-vous nous expliquer comment vous avez découvert que vous étiez atteint d’un trouble dissociatif de l'identité (TDI) ?  

J'ai pris rendez-vous chez une psychologue pour traiter les conséquences du harcèlement scolaire, ainsi que des viols répétés quotidiennement avec séquestration à mon domicile durant un mois. Après un an de suivi, à raison de deux séances par mois, elle me parle du trouble dissociatif de l’identité. La même semaine, les symptômes caractéristiques du TDI se sont manifestés. 

Actuellement, j’ai un suivi psychiatrique et, bientôt, la reprise d’un suivi avec une psychologue

Comment ce trouble se manifeste-t-il dans votre quotidien ? 

Dans mon quotidien, cela se manifeste par des difficultés à me repérer dans le temps, des troubles de la concentration, de la dissociation, une hypervigilance constante, des maux de tête, une grande fatigue et des troubles de la vision

Combien d’identités coexistent actuellement en vous ? Accepteriez-vous de nous en dire un peu plus sur elles ? 

Le système compte 9 alters, dont les plus présents sont présentés ci-dessous. À noter que le nombre d’alters dans un système peut évoluer au fil du temps. Cela peut être dû à la conscientisation de nouveaux alters, à la fusion ou à la dissociation d’alters. 

Parmi les alters les plus présents : 

  • Kyrah, 25 ans (réservé, productif, passionné) 
  • Elya, 25 ans (gaie, sociale, créative) 
  • Lady, 23 ans (créative, imaginative, confiante) 
  • Minimoys, 10 ans (vif, curieux, sociable) 


Comment se passent les transitions entre ces différentes identités ? Parvenez-vous parfois à les anticiper ? 

Cela dépend de l’organisation. J’essaie de prévoir une vision d’un mois à l’avance. Je m’organise grâce à un bullet journal sous forme de classeur, ainsi qu’à des applications sur Android. Je sais que, dans certains contextes sociaux, certains alters vont se manifester. J’ai ce que j’appelle une « salle de front ». Je peux comparer cela à la tour de contrôle qu’on voit dans les deux films Pixar. La tour de contrôle, c’est l’endroit où je peux communiquer avec les alters et transmettre des informations importantes. 

J’utilise également les notes de mon téléphone, des applications d’organisation et des to-do lists

Les switchs — le terme utilisé pour désigner un changement d’alter — varient d’un alter à un autre. Par exemple, je peux bailler à répétition, avoir des troubles de la vision, de l’équilibre, du langage et de la proprioception. Des tremblements physiques peuvent aussi être présents. Cela peut également se manifester par de la dépersonnalisation ou encore une fatigue accrue

Comment votre entourage réagit-il face à cette réalité ? 

Ma famille, à qui je parle régulièrement, n’est pas au courant. Une partie se sentirait coupable, alors qu’il n’y a pas de raison de l’être. D’autres prétexteraient que je mens et que je parle de cela pour attirer l’attention et la pitié. 

Les ami·e·s que j’ai actuellement sont celleux qui m’acceptent malgré les conséquences quotidiennes de mes troubles

Le soutien reçu sur les réseaux sociaux, ainsi que le fait de sortir de l’isolement, permettent aussi d’avancer, de partager son témoignage et d’apporter du soutien aux autres. 

Êtes-vous accompagné par un ou plusieurs professionnels de santé ? Qu’est-ce qui vous aide le plus dans votre parcours ? 

Je suis accompagné·e par une psychiatre qui prend également le temps d’instaurer un dialogue avec les personnes qu’iel suit. Bientôt, le 9 mai, je commencerai un suivi avec une psychologue. J’appréhende ce nouveau suivi : devoir encore raconter mon histoire, faire face à la réaction, devoir ou non faire de la pédagogie sur le trouble… 

Quelles sont, selon vous, les idées reçues les plus fréquentes à propos du TDI ? 

Parmi les idées reçues les plus fréquentes sur le trouble dissociatif de l’identité (TDI), on retrouve souvent les suivantes : 

  • Le TDI serait un trouble « rare », voire « inexistant » ou forcément accompagné d’autres troubles. 
  • Il serait perçu à tort comme un trouble « cool » ou à la mode
  • Certains pensent que les alters sont forcément violents, ce qui est totalement faux. 
  • Il existe aussi des préjugés sur les alters fictifs : on pense qu’ils sont des copies conformes de personnages de fiction, alors qu’en réalité, ils sont bien plus complexes et uniques. 
  • La dangerosité est souvent associée au TDI, alors que la majorité des personnes concernées ne présentent aucun danger pour les autres. 
  • Enfin, on croit souvent que les switchs (changements d’alter) sont toujours visibles ou spectaculaires, ce qui est loin d’être le cas dans la réalité. 

Quelles difficultés rencontrez-vous le plus souvent dans votre vie personnelle et sociale ? 

Tenir lors des interactions sociales du quotidien, sans oublier de dire quelque chose d’important ou de marquer un repère social essentiel. L’hypervigilance constante est épuisante. S’ajoutent des difficultés de concentration, des troubles de la vision, une perception altérée du temps de manière générale, ainsi qu’une fatigue chronique accrue, accompagnée de douleurs physiques persistantes. 

Avez-vous des moments de communication ou de coopération avec vos autres identités ? 

Oui, notamment lors des moments passés dans la "salle de front". La communication se fait aussi par l’intermédiaire de notes sur le téléphone, de l’application Simply Plural, ou encore via des listes de tâches (to-do lists). 

Vous sentez-vous en sécurité dans votre corps et dans votre esprit aujourd’hui ? 

Actuellement, il n’y a pas de stabilité ni d’harmonisation dans le système. Je suis beaucoup plus sujet à des crises dissociatives ou à des reviviscences traumatiques. L'impact des traumatismes se manifeste au quotidien. J’aimerais pouvoir vivre pleinement, plutôt que simplement survivre. Je mets en place différents éléments pour progresser dans ma santé mentale et dans mes projets.

Quels progrès avez-vous constatés dans votre cheminement ces dernières années ? 

J’ai constaté des progrès dans la compréhension théorique de mes traumatismes ainsi que dans la compréhension de mon fonctionnement global, grâce aux premières démarches diagnostiques concernant le trouble du spectre autistique. J’ai également fait des avancées à travers des rencontres sociales et professionnelles enrichissantes

Quel message souhaiteriez-vous transmettre à une personne récemment diagnostiquée avec un TDI ? 

Il est normal de se sentir perdu

Il est normal d’appréhender

Il est normal d’avoir un nombre d’alters qui n’est pas fixe

Oui, la cohabitation non désirée peut être difficile et frustrante

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Avec l'aimable autorisation de Kieran

Un grand merci à Kieran pour son témoignage !   
 
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avatar Candice Salomé

Auteur : Candice Salomé, Rédactrice Santé

Créatrice de contenus chez Carenity, Candice est spécialisée dans la rédaction d’articles santé. Elle a une appétence particulière pour les domaines de la psychologie, du bien-être et du sport.

Candice est... >> En savoir plus

1 commentaire


roseavril20
le 21/05/2025

Bravo Kieran pour votre témoignage, je ne connaissais pas du tout ce trouble, vous avez le courage d'en parler et je pense que cela doit vous faire du bien. Continuez ainsi, vous êtes un exemple pour toutes les personnes qui se sentent mal dans leur peau. Prenez soin de vous.

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