Cancer du sein et mastectomie : mon histoire
Publié le 22 oct. 2018 • Par Louise Bollecker
Il y a quelques années, @Cacalou a souffert d'un cancer du sein : une mastectomie, une reconstruction mammaire et le diagnostique d'une maladie rare plus tard, elle nous raconte son expérience. Si elle a connu des moments difficiles, le soutien inconditionnel de sa fille l'a aidée à rester positive !
Vous avez été soignée pour un cancer du sein de mai 2011 à août 2012 par chimiothérapie. À quel moment la mastectomie a-t-elle été envisagée ?
Dès mon premier rendez-vous à l'Institut Curie, le 31 mai 2011.
J'ai consulté la remplaçante de mon médecin traitant en avril 2011 (pendant les vacances scolaires). Elle m'a prescrit une échographie et une mammographie. Le radiologue m'a dit de voir mon médecin dans les plus brefs délais. Ce que j'ai fait puisqu'il était rentré de vacances. C'est donc mon médecin traitant qui m'a donné les coordonnés de l'Institut Curie. Le chirurgien qui m'a reçue, le 31 mai 2011, m'a dit que j'avais un cancer agressif, infiltrant et inflammatoire et qu'il fallait retirer le sein car la tumeur était grosse et qu'il y avait des cellules cancéreuses disséminées un peu partout dans le sein et jusque sur la peau.
Ma mère avait demandé à mon père de m'accompagner. Il faut savoir que j'ai quitté le domicile familial en janvier 1987 parce que je n'étais pas proche de ma mère au point que vivre sous le même toit qu'elle, au quotidien, me pesait. J'ai donc retrouvé mon père dans la salle d'attente. Je me suis assise à côté de lui, le plus dignement possible (car il y avait beaucoup de personnes présentes), pas par honte mais par respect pour celles qui étaient là pour la même chose que moi. J'ai pleuré avant même de pouvoir lui rapporter ce que le chirurgien m'avait dit.
Qu’en avez-vous pensé ? Était-ce une décision difficile à prendre ?
Je n'ai pas eu le temps de m'apitoyer sur mon sort car je devais me rendre au bureau des rendez-vous. En effet, j'avais les ordonnances pour un bilan sanguin, une biopsie et la pose d'un cathéter car la chimiothérapie allait débuter le 15 juin. Etre dans l'action, je pense que c'est ce qui m'a sauvée, en particulier de la déprime même si, le 8 juin, j'ai imaginé que je fêtais peut-être mon dernier anniversaire (46 ans).
La décision n'a pas été difficile à prendre puisque je n'avais pas d'autre choix si je voulais avoir une chance de guérir. Le programme était le suivant : chimiothérapie pour stopper la prolifération des cellules cancéreuses à partir du 15 juin 2011, mastectomie le 3 janvier 2012, puis nouvelle chimiothérapie et radiothérapie. On ne m'a pas caché que le plus gros risque pour ma santé se trouvait dans le fait qu'au moment de retirer le sein le chirurgien perce la tumeur.
Le plus difficile fut de l'annoncer à ma fille que j'ai toujours élevée seule puisque son père (Algérien vivant à Oran) ne s'est jamais installé en France pour vivre avec nous. On a beaucoup pleuré et, quand elle m'a demandé de me battre et de ne pas mourir, j'ai promis de faire de mon mieux.
Comment s’est passé votre chimiothérapie, avant l'opération ?
La chimio a consisté en 3 "cocktails" différents. Il y a eu 4 séances pour chacun, espacées de 3 semaines (voire plus si mon état et/ou mon bilan sanguin ne le permettait pas). J'étais allongée sur un lit ou assise dans un fauteuil, selon mon état. Pour celle d'octobre, ma fille et ma meilleure amie m'ont accompagnée car on savait que je ne rentrerais pas à la maison après. Sinon, j'y suis toujours allée seule, en taxi conventionné.
J'ai perdu mes cheveux dès le 30 juin 2011. Ma fille m'a rasé la tête quelques jours plus tard, car je ne supportais pas de retrouver des cheveux partout où je passais, y compris sur la table quand je mangeais ou préparais à manger, dans l'évier quand je faisais la vaisselle... Je lui ai demandé si je pouvais rester tête nue. Comme elle a dit que ça ne la dérangeait pas, je n'ai pas acheté de perruque. Pour sortir, je portais un foulard (j'en avais 3 différents en fonction de la couleur de mes vêtements), car je me suis rendu compte que j'avais froid à la tête quand il y avait du vent et aussi pour protéger ma peau du soleil puisqu'il est fortement déconseillé de s'exposer pendant les traitements. J'ai fait l'acquisition d'un bonnet beige après l'opération car mon bras droit avait perdu de ses capacités au point qu'ajuster et nouer un foulard était devenu quasi impossible. J'ai la chance d'avoir une fille extraordinaire qui caressait mon crâne "tout doux" et me faisais des bisous dessus.
Le regard des gens ne me dérangeait pas parce qu'étant obèse depuis l'adolescence (je pesais même 122 kilos avant le cancer et seulement 97 après ; maintenant j'oscille entre 105 et 110), je m'étais déjà habituée aux regards mauvais depuis bien longtemps. Le pire c'était mon visage cadavérique.
Quel type de mastectomie avez-vous subi ?
On m'a retiré le sein droit entièrement, mais aussi un peu plus de peau que celle qui couvre le sein (du fait que des cellules cancéreuses avaient envahi la peau), ainsi que les ganglions.
Comme j'avais une forte poitrine (je faisais un 120 E), j'ai dû également subir une réduction mammaire à gauche.
Vous avez enduré beaucoup de complications suite à cette opération, pouvez-vous nous expliquer ?
Il faut savoir que j'ai été hospitalisée 9 mois 1/2 au total. Les difficultés ont commencé durant la chimiothérapie préopératoire.
Fin septembre 2011, j'ai été hospitalisée à Curie, en soins intensifs, parce que j'étais déshydratée, dénutrie et anémiée. A mon retour, ma fille m'a avoué que lorsqu'elle partait au collège le matin, elle avait peur de me retrouver morte en rentrant le soir. Après la chimio d'octobre, j'ai été transportée en ambulance dans un centre de soins de suite (Ermitage Sainte-Thérèse à Chaville dans le 92) où je suis restée jusqu'à Noël (soit 2 mois, durant lesquels je n'ai jamais vu ma fille car c'était trop loin et trop compliqué pour qu'elle vienne seule).
Au cours de ce séjour, j'ai été mise à l'isolement durant plusieurs jours, à 2 reprises, faute d'avoir les défenses immunitaires nécessaires. Ces 2 périodes ont été difficiles car j'avais pris l'habitude de manger au réfectoire (sauf quand mon état m'obligeait à garder la chambre) avec d'autres malades qui n'étaient pas tous des cancéreux et qui étaient de tous âges. Ce que j'appréciais beaucoup car ce n'était pas un mouroir. En plus, il y avait un jardin et une chapelle, ainsi qu'une forêt (juste à côté), qui rendaient l'endroit encore plus agréable.
Quand j'ai perdu l'ongle du gros orteil et que tous les autres ont jauni, se sont dédoublés, se sont striés, j'ai pu compter sur le personnel de Curie pour s'occuper du problème. Lorsqu'il a fallu que j'applique un vernis sombre sur une sous-couche de vernis transparent (une corvée pour moi qui n'avais pas l'habitude de me maquiller !), j'ai pu faire appel à une socio-esthéticienne (service gratuit proposé par l'Institut Curie) qui s'occupait de mes ongles des mains et des pieds pendant la séance de chimio. C'était une femme adorable. A l'Ermitage Sainte Thérèse, ce service n'existait pas mais j'ai pu avoir recours à une pédicure -que j'ai payée mais qui est venue me voir dans l'établissement- car il fallait surveiller la repousse de l'ongle du gros orteil qui ne se faisait pas sans peine. Les autres étaient difficiles à couper car je n'avais pas de force et ils étaient devenus très épais.
J'ai été autorisée par Curie à passer les fêtes de fin d'année à la maison avant d'y être admise le 2 janvier 2012 pour être opérée le 3. J'y suis restée quelques jours avant d'être envoyée dans un centre de soins de suite (Clinique du Bois d'Amour à Drancy dans le 93) où je suis restée jusqu'au 16 août.
Les difficultés ont néanmoins continué...
Durant cette période, je suis retournée à Curie de nombreuses fois pour les séances de chimio et car j'avais du mal à cicatriser. En fait, un staphylocoque doré s'est installé dans la plaie à 2 reprises. La première fois, j'ai juste eu besoin de la faire nettoyer en profondeur car ça avait été pris à temps. Malheureusement, quelque temps plus tard, il a fallu ouvrir la plaie en grand, sous anesthésie locale, pour bien nettoyer avant de refermer. Après, les infirmières de Curie ont surveillé la cicatrice soit spécifiquement soit avant ou après ma séance de chimio selon son évolution.
Et puis un beau jour (pas tant que ça, en fait !), les coutures ont lâché. Je me suis retrouvée avec un trou à la place du sein ; bizarrement, ce n'était pas très douloureux et, surtout, ça ne saignait pas, ce que mon cerveau avait beaucoup de mal à appréhender. Les médecins ont qualifié ce phénomène de "désunion des couches de l'épiderme". Je suis devenue une attraction pour le professeur et ses élèves qui passait une fois par semaine. Tellement de gens m'ont vue torse nu durant ces longs mois que, malgré ma pudeur, j'ai fini par m'y habituer et je répondais aux questions qui m'étaient posées comme si tout était normal. Parfois j'étais quand même un peu émue en évoquant toutes ces péripéties mais quelquefois j'étais si détachée que j'avais l'impression que ce n'était pas moi qui parlais.
Je suis également retournée à Curie quand la décision de pratiquer une greffe de peau a été prise. Il a fallu faire intervenir 2 chirurgiennes. Celle qui avait procédé à la mastectomie et une de ses consœurs. Un rectangle de peau a été prélevé sur ma cuisse droite et greffé à l'emplacement du sein disparu. L'intervention a été une réussite mais, à cause de la maladie génétique du tissu conjonctif dont j'ignorais alors l'existence, la greffe n'a pas pris.
NB : je viens d'ailleurs de recevoir le formulaire qu'il faut remplir quand on refuse de donner ses organes car ma fille et moi ne pouvons plus être donneuses. J'ai eu un pincement au cœur quand j'ai dû retirer ma carte de donneur de mon portefeuille. Elle datait des années 80.
Quelques jours plus tard, je suis repassée au bloc pour que le greffon soit retiré. Il était tout fripé, tout sec. Après, pour assécher la plaie et favoriser la cicatrisation, on m'a posé un VAC. C'est une sorte d'aspirateur à exudat.
La radiothérapie que vous deviez suivre a ainsi pris du retard. Quel était votre état d'esprit ?
Avec tous ces incidents de parcours, la radiothérapie avait en effet pris du retard car il fallait que la cicatrice soit parfaitement fermée pour la faire. Je crois que c'est ce qui me stressait le plus à l'époque car j'avais peur que le cancer ne soit pas totalement et définitivement éradiqué. Comme j'ai rencontré beaucoup de malades durant ces mois d'hospitalisation, dont certains avaient affronté une récidive, j'avais peur de devoir revivre ce cauchemar. Pour le reste, l'ensemble des soignants de Curie étant réactif à chaque fois qu'un nouveau problème survenait, j'étais plutôt sereine. Je me souviens que diverses personnes s'étonnaient que je garde le sourire malgré les circonstances. Je répondais que les personnes que je rencontrais n'étaient en rien responsables de mes soucis de santé, bien au contraire puisqu'elles essayaient de me sauver la vie, dans la mesure du possible.
L'équipe soignante de la clinique du Bois d'Amour était attentive. J'étais suivie par une ergothérapeute, pour retrouver un peu de mobilité au niveau du bras droit, et une ou un kiné pour retrouver un peu de tonus musculaire. De plus, le médecin n'hésitait pas à prendre conseil auprès de Curie voire à m'y renvoyer si nécessaire.
A l'époque, j'étais très fatiguée par tous les allers-retours à Curie. Aussi, je déjeunais au réfectoire où j'ai sympathisé avec divers malades, mais je dînais dans ma chambre. Des collègues venaient me voir et m'apportaient des douceurs. Du coup, je pouvais inviter certaines malades à prendre le thé dans ma chambre.
Je suis restée en contact avec une aide-soignante de la Clinique du Bois d'Amour qui prend régulièrement de mes nouvelles, par sms ou téléphone, et qui me rend visite 2 ou 3 fois par an.
Le plus difficile à vivre dans ces univers clos, que sont les centres de soins de suite, c'est le décès d'un malade, qui laisse un grand vide, parce qu'on le voit tous les jours, donc bien plus que notre famille. Entre malades, on évoque aussi des sujets douloureux dont on s'interdit de parler à nos proches pour ne pas les inquiéter ou parce qu'ils ne nous comprendraient pas. Deux femmes sont mortes après mon retour à la maison, alors que j'étais toujours en contact avec elles. Parfois, je culpabilisais d'être toujours vivante, surtout avec toutes les occasions de mourir que j'avais rencontrées. C'est en m'occupant de ma fille malade que j'arrivais à remonter la pente.
Pourquoi avoir choisi de pratiquer une reconstruction mammaire ? Vous n’aviez pas peur d’être opérée à nouveau, suite à toutes les complications que vous aviez eues ?
Bien sûr que si, j'étais extrêmement angoissée à l'idée de me faire opérer à nouveau. Je me suis même dit que le comble serait de mourir pendant ou après la reconstruction mammaire alors que j'avais survécu au cancer. Mais ma fille a commencé à avoir des problèmes de santé dès la rentrée scolaire de septembre 2011. Elle a redoublé la classe de Première et arrêté l'école avant l'entrée en Terminale parce qu'elle a dû être hospitalisée 2 fois en 2013 et 2 fois en 2014.
Le 3 septembre 2015, je l'ai accompagnée à l'Hôtel Dieu à Paris, à sa consultation avec le professeur Hamonet, spécialiste du Syndrome d'Ehlers Danlos (SED). A la fin du rdv, il m'a dit : "Vous l'avez aussi". Il a écrit un mot pour que mon nouveau médecin traitant (j'en ai changé quand j'ai constaté qu'il ne croyait pas que ma fille était gravement malade) me prescrive tout ce qu'il avait prescrit à ma fille. Je lui avais rapidement expliqué les différents problèmes que j'avais rencontrés durant le combat contre le cancer et avait évoqué ma longue absence, car ce type de maladie rare se déclenche après un décès, un divorce des parents ou tout autre choc physique et/ou psychologique. Il m'a dit qu'en raison de mes problèmes d'équilibre, à l'origine de nombreux chocs et chutes, sur le plat ou dans des escaliers et qui m'ont valu de me déplacer des côtes, des vertèbres, le bassin et de me faire des entorses avec épanchement de synovie, il était préférable que j'opte pour la reconstruction mammaire à condition d'exclure les prothèses et d'informer le chirurgien que j'avais un SED, J'ai donc pris rendez-vous avec le chirurgien que m'avait recommandé l'Institut Curie et la reconstruction s'est faite en novembre 2015 avec des lambeaux du grand dorsal. Malheureusement les ennuis n'étaient pas terminés car j'ai dû subir deux ponctions à cause d'une poche de liquide qui s'est formée dans l'espace laissé vide, et ce à 2 reprises dans les mois qui ont suivi. Aux alentours de Noël 2015, je suis allée aux urgences car la cicatrice dans le dos (à l'endroit des prélèvements) s'était infectée.
Ce samedi 6 octobre 2018, j'ai passé une échographie du dos qui a montré qu'une poche de 1.5 cm de profondeur (par endroits) et de 15 cm de hauteur s'est de nouveau formée. Le radiologue a refusé de pratiquer la ponction car, selon lui, il y a un trop grand risque d'infection. De plus, il a ajouté que ça se reproduira. Hier, mon médecin traitant a rédigé un mot à l'attention du chirurgien. Je dois prendre un rdv avec lui dès que possible.
A Curie, on m'avait dit que j'avais des problèmes neuropathiques dans les mains et les pieds et j'avais un traitement médicamenteux spécifique contre ces douleurs. En 2015, comme ça s'était aggravé, j'étais allée voir une neurologue qui m'avait fait passer une IRM médullaire car elle trouvait que mes problèmes étaient plus importants que ceux qu'elle constatait sur des patients qui avaient suivi une chimiothérapie. L'examen n'avait rien révélé d'anormal. Et pour cause, c'est le SED qui en était à l'origine.
Comment avez-vous réagi après l’opération ? Qu’avez-vous pensé de votre apparence ?
A vrai dire, avec les complications, j'ai longtemps eu un pansement et des soins infirmiers. L'esthétique n'était pas du tout ma priorité. Je voulais seulement guérir pour rentrer chez moi le plus vite possible afin de retrouver ma fille. Le fait d'être célibataire était également un avantage car je n'ai pas eu à me demander comment mon conjoint allait réagir ni s'il allait encore me trouver désirable. J'ai rencontré des femmes qui m'ont avoué que leur mari les avait quittées, soit pendant leur séjour à l'hôpital, soit à leur retour chez elles. Je n'ai heureusement pas eu à vivre l'une de ces situations.
J'ai dû faire l'acquisition de nouveaux soutien-gorge sans armatures puis, plus tard (avant la reprise du travail en juin 2014) avec armatures car j'avais un peu plus d'une heure de trajet, chaque matin et chaque soir, à faire en bus et métro. J'avais été approchée par des bénévoles de La Ligue contre le cancer. Elles m'avaient donné une prothèse externe que je plaçais dans le bonnet droit. Comme je ne portais pas de décolleté plongeant ni de vêtements moulants, je n'ai jamais été gênée par mon apparence physique.
Quel type de mastectomie avez-vous subi ?
On m'a retiré le sein droit entièrement, mais aussi un peu plus de peau que celle qui couvrait le sein (du fait que des cellules cancéreuses avaient envahi la peau), ainsi que les ganglions sous l'aisselle droite.
Votre confiance en vous a-t-elle été affectée durant toutes ces épreuves ?
Pas du tout. Pendant le combat contre le cancer, je ne pensais qu'à me soigner pour retrouver ma fille restée seule alors que c'était l'année du brevet des collèges, une année importante pour elle qui voulait faire médecine afin de devenir médecin légiste. Le fait de rentrer à la maison, en vie, après une si longue absence et de devoir m'occuper des problèmes de santé de ma fille, dont j'étais indirectement à l'origine, m'a évité de trop penser à moi. En juin 2014, j'ai repris le travail à temps partiel (lundi et jeudi au bureau, mardi après-midi et vendredi à la maison) pour pouvoir aller chez le kiné le mardi matin et me reposer le mercredi. J'étais épuisée et douloureuse mais tellement heureuse de retrouver mon poste et mes collègues étaient contents pour moi. Certains avait réussi à me rendre visite durant mes nombreux séjours à l'hôpital ; d'autres étaient restés en contact par sms ou téléphone ; mais aucun ne m'avait lâchée. A défaut d'être entourée par ma famille, j'ai pu compter sur le soutien de mes rares ami(e) et collègues.
Une fois diagnostiquées SED, nous avons été prises en charge par une équipe (composée d'un kiné, d'un psy et de 2 sage-femmes) chaque mercredi et samedi après-midi. Nous avons eu la chance de sympathiser avec une maman et sa fille au point que le kiné a proposé que nous fassions la séance du samedi ensemble. Depuis nos filles sont amies. Parler avec des malades atteints du SED et des soignants qui connaissent cette maladie a été bénéfique tant pour moi que pour ma fille, à la fois sur le plan physique et mental.
Quels conseils donneriez-vous à des patientes qui font face à une mastectomie ?
Peut-être que si je n'avais pas été une secrétaire obèse et mère célibataire, j'aurai pu voir les choses différemment mais ma priorité a toujours été de rester en vie pour pouvoir rentrer à la maison m'occuper de ma fille de 14 ans 1/2. Je ne voulais pas qu'elle pense que je l'avais abandonnée. Cela ne m'a pas empêché de souhaiter mourir dans mon sommeil, des centaines de fois, mais bizarrement, le matin, j'étais contente d'être en vie et j'attaquais la journée avec autant d'entrain que mon état le permettait.
Certains ont dit que j'étais très courageuse mais ils se trompaient car j'avais une trouille monstre parce que je me demandais comment j'allais supporter la prochaine chimio, comment la mastectomie allait se passer, ce qui pouvait m'arriver de pire que de devoir combattre simultanément cancer et staphylocoque doré, si la greffe allait fonctionner, quand la radiothérapie allait enfin pouvoir commencer... C'est un combat permanent contre la maladie mais aussi contre ses angoisses. Il faut également se blinder face aux mauvaises nouvelles médicales mais aussi face aux réactions de certains proches qui s'éloignent voire nous quittent, aux "conseils" de personnes qui connaissent quelqu'un qui a subi telle ou telle opération et/ou suivi tel ou tel traitement, aux regards des autres, à certaines réflexions de proches ou du corps médical.
Un mot de la fin ?
Je n'ai pas honte d'avouer que j'ai beaucoup pleuré mais, durant ces longs mois d'angoisse, j'ai également eu la chance :
- de voir des chirurgiens, médecins, infirmiers, aide-soignants mettre tout en œuvre pour que je guérisse, malgré toutes les complications ;
- de faire de belles rencontres avec des malades, avec le personnel soignant au point de rester en contact avec certains après avoir quitté les endroits où j'avais séjourné ;
- de beaucoup discuter et rire : avec des malades, avec le personnel soignant, avec les chauffeurs de taxi, de vsl et d'ambulance qui m'ont transportée, avec le personnel de service, avec mes rares visiteurs, pendant les séances collectives d'ergothérapie ...
Quand j'entendais ma fille me dire "Je t'aime très fort ma petite maman chérie", je me disais que j'avais beaucoup de chance. Et pourtant je suis restée des mois entiers sans la voir mais ça me donnait la force nécessaire pour me battre.
Un immense merci à @Cacalou d'avoir partagé son histoire avec sincérité. N'hésitez pas à laisser un commentaire pour exprimer votre soutien, poser vos questions ou dialoguer sur la mastectomie !
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